Serge
Folio
Serge
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Le pitch
"En début d'année, Serge s'était rendu en Suisse pour faire une cure de bouillon. Harcelé par Valentina pour changer de corps, il avait accepté une retraite dans une clinique de médecine intégrative sur le lac de Vaar. Là, humant l'air du Waponitzberg sur sa terrasse panoramique et carrelée, engoncé dans une pelisse de mouton et ceint d'une couverture, il entamait à prix d'or son repos digestif (autrefois dit jeûne) par un bouillon de légumes et une eau minérale. Le lendemain, le bouillon disparaissait du protocole et ne lui restait que l'eau et la tisane aromatique à volonté. Une impression de malheur l'avait assailli."
Mon avis
Vous avez vu le titre ? Vous avez lu le pitch ? Bien : si ces deux éléments vous inspirent, n'hésitez pas, entrez dans ce roman avec une confiance relative.
Si ce bouillon tiède ne vous dit rien, faites comme j'aurais du le faire : reposez le livre et choisissez en un autre.
Comme je l'ai dit par ailleurs, je considère Yasmina Reza comme la plus grande dramaturge française des dernières décennies.
Mais depuis qu'elle a écrit - beaucoup ! - hors du contexte théâtrale, je n'ai pas retrouvé celle que j'adorais.
La faute, sans doute, aux sujets traités. Yasmina Reza semble travailler avec un constant manque d'inspiration; ses sujets sont flous, et il m'indiffère.
La faute aussi, à cette habitude prise de faire parler les "gens".
Les personnes du monde normal. Ceux que la grande bourgeoisie appelait auparavant "le petit peuple".
Reza aime faire parler les gens, longuement. Elle le fait assez bien d'ailleurs, puisque les conversations qu'elles déroulent à longueur de page sont le reflet de beaucoup de réflexions entendues un peu partout.
Des lieux communs, des approximation linguistiques, des périphrases stupides. C'est censé faire rire le lecteur, mais en fait, après quelques chapitres, cela agace, cela énerve même.
Parce que le procédé est terriblement répétitif (dans Serge, c'est insupportable), mais surtout parce qu'il porte en lui-même une forme de mépris, ou a minima de condescendance. C'est drôle parce que c'est bête, ou parce que c'est commun ?
Son précédent roman, Babylone, était déjà de cette eau là. Deux fois de suite, ça suffit : j'ai laissé tomber après le passage à Auschwitz, cette fausse bonne idée de confronter ces gens là avec l'horreur absolu; surtout qu'ils sont juifs.
Yasmina Reza abandonne aussi ici les principes élémentaires du récit romanesque structuré.
Le texte fait 240 pages, sans chapitre, sans arc narratif identifiable, et quasiment sans paragraphes, avec quelques misérables et insuffisants sauts de ligne et retours à la ligne (de surcroit sans aucun retrait).
Quant aux personnages, ils sont tous appelés par leur prénom, sans que jamais l'auteure ne fasse l'aumône de les situer dans leur contexte, les uns par rapport au autres.
J'aimerais tant que Yasmina Reza revienne au théâtre; parce que pour les romans, pour moi, c'est fini.
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