Une mort qui en vaut la peine
Albin Michel / Le livre de poche
Une mort qui en vaut la peine
Albin Michel / Le livre de poche
Le pitch
1917, quelque part entre la Géorgie et l'Alabama. Le vieux Jewett, veuf et récemment exproprié de sa ferme, mène une existence de misère avec ses fils Cane, Cob et Chimney, auxquels il promet le paradis en échange de leur labeur.
À sa mort, inspirés par le héros d'un roman à quatre sous, les trois frères enfourchent leurs chevaux, décidés à troquer leur condition d'ouvriers agricoles contre celle de braqueurs de banque. Mais rien ne se passe comme prévu…
Après Le Diable, tout le temps, couronné par de nombreux prix, Donald Ray Pollock revient avec une odyssée sauvage à l'humour très noir.
Mon avis
Quand on a été - comme je l'ai été - littéralement subjugué il y a trois ans par Le diable tout le temps, le premier roman - très tardif - du quinquagénaire Donald Ray Pollock, quand on a été aussi séduit par son époustouflant premier recueil de nouvelles, Knockemstiff, impossible de ne pas attendre avec énormément d'espoir et un peu d'appréhension son deuxième récit.
Les auteurs capables d'écrire deux chefs-d'oeuvre d'affilée - car Le diable était un chef-d'oeuvre, indubitablement ! - se comptent sur les doigts d'une main, dans l'histoire de la littérature. Ce sont des miracles.
Malheureusement, Une mort qui en vaut la peine démontre une fois de plus que les miracles ne courent pas les rues, mon bon monsieur.
Car, tout compte fait, l'entreprise se révèle fort décevante.
Déjà, il y a le titre à la con de la traduction.
Désolé pour cette vulgarité qui ne me ressemble pas (n'est-ce pas ?) mais traduire de cette façon La table du paradis (The heavenly table) est stupide.
D'abord parce que le titre français ne correspond à rien; ensuite, parce que le titre américain était non seulement très beau, mais il avait un sens, un vrai, au regard du contenu du roman !
Mais bref, passons outre et passons la couverture. Que dire du contenu ?
Que l'on retrouve, dès la première page, le style et les thèmes de Pollock.
Joli style classique, essentiellement assis sur de nombreux dialogues.
Thèmes oh combien sombres et tourmentés, tournant autour de la mort, du sexe et du destin.
Mais dès les premiers chapitres, le temps m'a semblé long. Une mise en place interminable, une centaine de pages pour installer deux groupes de personnages qui, plus tard, se croiseront.
Qualité d'observation de Pollock, minutie des peintures des personnages : top, au rendez-vous.
Mais quid de l'histoire, de l'intrigue ?
Très vite, il m'est apparu que Pollock avait oublié l'essentiel.
Raconter des personnages, ok, il y de drôles de spécimens, et sans doute même un peu trop. Succession interminable de gueules cassées.
Mais raconter une histoire ? Quelle histoire ? Elle tient en deux lignes.
Le roman s'est accroché à mes mains et à mes yeux de toute ses forces, usant de sa séduction stylistique (je ne sais pas si l'image vaut grand chose, question style, mais bon...), mais, sur la durée, la lassitude a fini par gagner le combat et j'ai terminé ma lecture en roue libre (600 pages, tout de même !).
Qu'ai-je retenu du roman ? Une overdose de sexe, de foutre, d'urine et de merde, de sang et de laideur.
Littéralement (vous ne me croyez pas : allez voir vous-même).
Et cela pour dire quoi, expliquer quoi ? Le diable tout le temps était écrit avec une intention. Je n'en ai pas vue dans celui-ci.
Le roman naturaliste dépeignant l'Amérique profonde est à la mode parmi les écrivains américains, et Pollock est parmi ceux qui lui a donné ses lettres de noblesse.
Mais là, trop c'est trop.
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