Le pitch

D'un côté, il y a Luisa, 30 ans, photographe culinaire célibataire et incapable de vivre plus de quelques semaines avec un homme. De l'autre, Luisa, 15 ans, des rêves plein son sac à dos, une folle envie de trouver l'amour et de vivre de la photographie... Mais aussi des sentiments inassumés pour Lucie, sa copine lesbienne.

Un jour, aussi invraisemblable que cela puisse lui paraître, la Luisa adulte voit débarquer sur le pas de sa porte l'ado qu'elle était ! Cette rencontre sera décisive pour la jeune femme car elle fera remonter à la surface des frustrations trop longtemps enfouies.

Un récit initiatique à rebours, qui entraîne le lecteur dans une quête intime de réalisation personnelle, porté par le trait joueur et les couleurs pleines de vie de Carole Maurel.

Mon avis

Il est des œuvres portées par une idée, d'autres par un message.

Luisa ici et là est un roman graphique qui l'est, un peu par les deux.

L'idée, délicieuse et excellente, c'est de faire se télescoper grâce à un tour de passe-passe fantastique deux versions d'une même femme, l'une adulte accomplie, l'autre à la sortie de l'adolescence.

Comment ? Grâce à un coupe de baguette magique scénaristique comme on en voit souvent dans les romans (le merveilleux Quartier lointain), et encore plus souvent au cinéma (ex : Camille redouble).

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Carole Maurel, aux graphismes simples (très peu de décor, l'image est concentré - un peu trop systématiquement - sur les personnages), semi réalistes, mis en couleurs avec des nuances chaudes, reprend ici, à peine détournée, le principe d'une confrontation d'une adulte avec sa propre adolescence.

La différence, originale, ici, c'est que les deux versions de la même femme ne se substituent pas, mais se rencontrent.*

Imaginez : que feriez-vous si, âgé de 35, 40, 45 ans, vous retrouviez sur votre paillasson une (ou un) ado qui est... vous même ?

Intéressant, non ?

Le message, c'est celui de la tolérance.

Tolérance envers les autres, envers ceux qui sont différents; non pas en mieux ou en moins bien, juste différent.

Et tolérance envers soi-même, pour tous ceux qui n'assument pas (ou ne reconnaissent pas) leur propre différence.

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La différence, dans Luisa, c'est la sexualité.

Vivre, admettre son homosexualité, pour une fille, ce n'est pas évident, pas plus que pour un homme !

Voilà l'idée et le message que Carole Maurel prend à bras le corps et développe dans son roman graphique qui est... un sacré pavé !

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270 planches imprimées sur un papier épais, avec une couverture cartonnée épaisse, cela pèse lourd dans les mains... et dans le portefeuille car, c'est dommage, le prix de l'ouvrage est carrément prohibitif. 32 € ? Mais qui va dépenser une somme pareille pour un roman graphique, aussi conséquent soit-il ? Erreur stratégique de la maison d'édition La boîte à bulles.

Dommage, car le récit est assez bien maîtrisé, subtil, intelligent, sensible, le dessin de Carole Maurel étant bien en phase avec l'ambiance du roman.

Mais aussi dommage car l'ensemble est carrément trop long, avec un découpage en cases trop grandes (4 ou 5 par planches pour la plupart, seulement) .

L'histoire démarre trop lentement et l'accumulation de nombreuses scènes redondantes rend le fameux message un peu répétitif.

Un projet sympathique qui mériterait une publication dans un format accessible financièrement à tous.