L’oreille interne

Robert Silverberg

Folio SF

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Le pitch

David Selig, Juif new-yorkais d'une quarantaine d'années, se considère comme un raté. Il est pourtant télépathe et pourrait profiter de ce don pour faire fortune, conquérir - et garder ! - les plus belles femmes... Mais non, rien à faire, il estime être un monstre tout juste bon à faire le nègre sur des devoirs d'étudiants, incapable de réussir sa vie. La dernière preuve en date : ce talent qu'il déteste tant, mais qui est finalement son seul lien avec le reste de l'humanité, est en train de le quitter ! Apeuré à l'idée de se retrouver seul avec lui-même, Selig nous conte sa misérable existence.

Grand roman psychologique, plein d'humour et de mélancolie, L'oreille interne est peut-être le plus beau livre de Robert Silverberg et à coup sûr un chef-d'oeuvre de la science-fiction.

Mon avis

Robert Silverberg fut et restera (il a actuellement près de 90 ans) un des auteurs américains les plus talentueux et les plus prolifiques de l'Age d'or de la SF américaine.

La preuve ? Dans les années 60 et 70, c'est à un rythme de 3 à 4 excellents romans par an qu'il avance, jalonnant sa bibliographie d'une série de petits bijoux comme (parmi bien d'autres)  L'homme dans le labyrinthe ou Les monades urbaines.

C'est en 1972, un an après ce dernier titre, qu'il publie L'oreille interne, un des meilleurs romans jamais écrit sur le thème de la télépathie.

Ce qui la qualité unique de ce texte, c'est la manière dont Silverberg traite le sujetn complètement à l'envers des autres auteurs.

Ici, la télépathie n'est pas un don formidable, un pouvoir permettant de se distinguer des autres humains.

David Selig n'est pas un surhomme, qui utilise ce pouvoir pour obtenir toute ce qu'il veut (argent, femmes, etc.). Au contraire : David Selig vit son destin comme un drame car il n'a jamais su vivre en accord avec cette chose qui lui permet de lire dans la tête des autres.

Lorsque celle-ci était puissante, alors qu'il était jeune, il s'en est servi maladroitement, mal à propos, comme s'il était handicapé, différent des autres.

Plus tard, les années passant, la diminution de ce pouvoir le rend doublement malheureux - paradoxe - puisqu'il perd la seule chose qui le distinguait des autres.

L'oreille interne est en fait bien loin d'un roman de SF : sans la moindre scène spectaculaire, c'est un drame psychologique fantastique, profondément ancré dans l'époque à laquelle Silverberg écrit son texte.

Années de libération sexuelle, de l'usage expérimental de la drogue, des terribles drames de la ségrégation, la fin des 60's est ici restituée avec autant de causticité que d'humour.

David Selig est un juif urbain, pas bien riche, bourré de contradictions, et de surcroit de moins en moins télépathe.

Ce qui peut le sauver ? Sans doute, bizarrement, la perte de son pouvoir.

A ce titre, la fin du roman (pas de spoil !) est un message de Robert Silverberg plutôt rassurant et optimiste.

N'hésitez pas : un classique de l'auteur.

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