Le pays des oubliés
Sonatine
Le pays des oubliés
Sonatine
Le pitch
Abandonné à la naissance, Jack est passé d'orphelinats en foyers, avant que Maryann, une lesbienne mise à l'écart par la bonne société de Louisiane, le prenne sous son aile. Aujourd'hui celle-ci vit ses derniers jours et sa propriété est menacée par les banques.
Jack, qui veut à tout prix conserver cet héritage, doit trouver l'argent nécessaire. Mais, le corps cassé par une vie de combats, ravagé par de multiples addictions, il ne se sent plus la force d'avancer. D'autant plus qu'il doit aussi affronter Big Momma Sweet, qui règne sur cet empire du vice qu'est le delta du Mississippi.
Mon avis
J'ai eu le privilège d'être, en 2015, un des premiers lecteurs français à "repérer" Michael Farris Smith.
Ce repérage, je l'avais fait, avant tout, grâce au talent de dénicheur de Super 8 éditions, qui avait publié son grand roman post-apocalyptique Une pluie sans fin.
Dans mon commentaire, à l'époque, j'avais indiqué que la comparaison de l'éditeur avec La route, de McCarthy, n'était pas absolument ridicule.
Et j'avais conclu par : "si vous aimez les récits noirs qui feraient presque passer Walking Dead pour une gentille ballade chez les zombies, alors allez-y !".
Deux ans plus tard, l'auteur confirmait avec Nulle part sur la Terre, pour lequel je terminais ma critique par "Nulle part sur la Terre est une oeuvre satisfaisante : on en sort rasséréné car, loin d'être sur le fond un récit aussi noir qu'Une pluie sans fin, il est porteur d'une certaine foi dans l'humanité."
Et nous voilà à nouveau deux ans plus tard. Jamais deux sans trois... ou pas ?
Gloups : la passe de trois. Fatale à certains.
Mais là, ça passe. Mais tout juste. Explication :
Déjà, il a fallu digérer un titre mal calibré (The fighter, le titre original, a un sens - non ? - m'sieur l'éditeur ?) et une illustration de couverture glauques à souhait.
Puis s'enfoncer dans un récit à la tonalité guère plus souriante que ce premier contact.
Désespérance, Amérique profonde, pauvreté économique et morale.
Que du noir de chez noir... comme dans les deux titres évoqués plus haut.
Avec la même qualité d'écriture, sèche, précise, mais non dénuée de cette forte capacité empathique que l'on trouve si rarement chez la plupart des auteurs contemporains, ainsi que d'un brin de poésie qui séduira les lecteurs attirés par le romantisme, le vrai, le romantisme désespéré du XIX° siècle littéraire.
Jack, le personnage principal, est une gueule cassée, au sens propre comme au figuré, et il va croiser le chemin d' Annette, autre figure marquée - au sens propre, puisqu'elle est tatouée de la tête au pied ! - par la vie.
Comme dans Nulle part sur la Terre, le rapprochement de ces deux êtres nourrit la seconde partie du roman, pour lui apporter un peu de clarté, d'espoir.
Mais si tous ces éléments placent le roman dans la catégorie des bons livres, il y manque deux choses.
La première, c'est un brin de renouvellement dans les thèmes proposés par l'auteur.
On est en territoire connu, au point que l'histoire se révèle très - trop prévisible pour celui qui connait déjà bien Michael Farris Smith.
La seconde, c'est que c'est un poil trop glauque.
OK, c'est tout à fait dans la mouvance de la littérature américaine à la mode, celle des confins d'un grand pays à la population divisée par un destin économique trop inégal.
Mais au bout d'un moment, on sature. Enfin... je sature ! Steinbeck n'a pas écrit que Les raisins de la colère, mais aussi Tortilla flat !
Conclusion : allez-y en confiance, si vous avez le moral.
Mais j'attends plus de l'auteur pour le prochain. Allez Michael, t'es jeune, lâche toi, c'est maintenant ou jamais !
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