Le bouc émissaire

Daphné du Maurier

Le livre de poche

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Le pitch

John, un historien anglais en vacances en France, rencontre au Mans par hasard son sosie parfait, Jean de Gué. Les deux hommes font connaissance : l'un est solitaire, sans famille, l'autre, épicurien désinvolte, se plaint de la sienne qui l'étouffe. Le lendemain matin, John se réveille, vêtu des affaires de Jean, qui a disparu. À la porte, le chauffeur l’attend pour le ramener au château. John prend alors la place de Jean…

Comme dans Rebecca, on retrouve dans ce livre la cruauté, l’étrangeté et l'art du suspense de Daphné du Maurier.

Mon avis

Daphné du Maurier ? Impossible de passer à côté d'une des grandes dames de la littérature anglaise du XX° siècle, dont de nombreuses oeuvres ont été portées à l'écran par d'importants réalisateurs (trois adaptations rien que pour Alfred Hitchcock !).

Allez vous promener sur le site, vous pourrez lire certaines de mes critiques, qui, sur la palette  des sentiments, vont de l'enthousiasme évident jusqu'à la franche déception.

Car s'il y a bien une chose qui caractérise l'auteure de Rebecca, c'est sa capacité à prendre des risques : changer de registre, mêler les genres, passer du polar au roman historique, du fantastique au drame psychologique.

Parfois, c'est superbe; parfois, c'est plutôt réussi; parfois, c'est raté.

Avec Le bouc émissaire, un de ses romans qui n'a pas passé franchement le cap de la notoriété post-mortem (j'ai découvert ce titre grâce à la réédition du livre de poche en 2023), c'est plutôt réussi.

On retrouve dans cet épais roman un des talents majeurs de Daphné du Maurier : sa capacité à installer un suspens étrange, malsain, dans un huit clôt social.

Recette ? Prenez un écosystème installé comportant une grosse poignée de personnages - plus de 5, moins de 10 - et propulsez y un étranger.

L'arrivée de l'étranger va, peu à peu, provoquer des interactions inattendues au sein de l'écosystème, réveiller des problèmes, révéler des secrets, faire rejaillir des drames - parfois des crimes !

 Nul mieux que Daphné du Maurier ne sait dépeindre aussi finement, subtilement, la complexité des relations humaines, dans toute leur subtilité et leur noirceur.

Avec une idée de départ excellente bien qu'a priori tout à fait improbable (on y croit, ou on y croit pas), elle crée ici une dramaturgie particulièrement efficace qui, si vous aimez les thrillers psychologiques, va vous ravir (même si, probablement, vous serez comme je l'ai été un peu déçu par le dénouement).

L'aspect le plus dérangeant du récit, et en même temps le plus séduisant, est l'aspect complètement désuet du contexte social dépeint dans ce roman de 1957 : la France que décrit l'auteure n'existe plus depuis bien longtemps, cette France où les ouvriers et les paysans s'inclinent bien bas devant "Monsieur le Comte".

C'est pour cela qu'il faut lire Le bouc émissaire (titre raté) comme un roman social historique, au même titre que les grands romans de François Mauriac.

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