Intermezzo

Sally Rooney

Gallimard

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Le pitch

Ivan et Peter, deux frères que les années ont éloignés, se retrouvent à la mort de leur père. Ivan, vingt-deux ans, est un brillant joueur d'échecs, ultrasensible et solitaire. Peter, juriste renommé de Dublin, est un trentenaire aux multiples conquêtes. Tous deux vivent des amours périlleuses pendant ce moment délicat du deuil, intermède de vie où la fragilité n'exclut pas l'aventure.

Avec Intermezzo, l'Irlandaise Sally Rooney signe un nouveau roman sensuel et fascinant dans la veine de Normal People, où les personnages se mettent à nu, les couples se font et se défont dans une délicieuse confusion des sentiments.

Mon avis

Comment survivre à un succès géant ? C'est le pari auquel a été confronté Sally Rooney, toute jeune auteure irlandaise, après la déflagration Normal people, un bouquin vendu à tour de bras dans le monde entier alors qu'elle n'avait que 27 ans.

J'avais, à l'époque, salué l'originalité de ce roman qui apparaissait, de prime abord, comme un monument de "non style" difficilement lisible puis, sur la durée, autrement plus subtil qu'on aurait pu le craindre.

J'écrivais alors (j'adore me citer !) :

Il faut serrer les dents en lisant les deux premières pages du roman. Ecrit dans un style, ou plutôt un non style total, une écriture blanche avec de nombreux dialogues sans tiret, tout juste un retour à la ligne (je déteste !)

(...) Puis une étrange magie s'opère, peu à peu. Et il faut bien avouer qu'une fois accroché à l'hameçon de Sally Rooney, difficile de décrocher à cette drôle d'histoire.

(...) En fait, Sally Rooney parvient à surprendre le lecteur en contournant tous les codes habituels des romans d'amour classiques, pour se rapprocher au plus près de ce qu'est la vraie vie : un chemin semé d'embuches et d'incertitudes.

Eh bien, je dois bien admettre que pour Intermezzo, mon analyse est quasiment identique, mais en mieux !

Les premières pages sont toujours illisibles pour un lecteur lambda (c'est moi).

Des phrases qui s'alignent - narration ou dialogues mélangés - sans logique, des retours à la ligne... ou pas, aucun tiret pour les dialogues.

L'auteure déroulera les 450 pages du roman sur le même principe de mise en page, je déteste vraiment, même si le cerveau s'habitue au bout d'une vingtaine de pages.

Après, c'est l'histoire, non pas d'un amour entre deux êtres, mais de plusieurs amours, sentimentaux ou fraternels, entre cinq personnes, deux hommes et trois femmes.

Une plongée dans la description de leurs pensées, de leurs sentiments, des valses hésitations entre amour et haine, dépression et amitié.

La valse hésitation de la vie, telle qu'elle existe et telle que nous la vivons, tous, plus ou moins.

Avec des certitudes absolues, qui deviendront parfois de terribles incertitudes.

Sally Rooney est une auteure vraiment talentueuse qui, de surcroit, progresse sans cesse dans son travail.

C'est même ce qu'il y a de plus fascinant dans Intermezzo : on voit à quel point le roman est dans la droite ligne de Normal people, car on y retrouve en grande partie les mêmes thèmes, les mêmes obsessions, mais écrit avec beaucoup plus de maturité et de subtilité.

Le crash test vous le savez, pour moi, c'est celui du Tourne Page. Est-ce que je tourne la page, encore et encore ?

Avec Intermezzo, j'ai suivi avec une constance révélatrice le destin des deux frères, de leur amitié/détestation filiale, de leurs découvertes/redécouvertes de l'amour/amitié.

A part quelques vraies longueurs dans le dernier tiers du roman (développements ou idées redondantes, on a l'oeil qui glisse souvent, on aurait pu gagner vingt ou trente pages, pour un résultat meilleur), le bouquin accroche, émeut, fait réfléchir.

Pas de doute, lancez vous, Sally Rooney a vraiment un talent très particulier.

Et si elle continue à progresser ainsi, j'imagine qu'elle sera, parvenue à la quarantaine, une auteure exceptionnelle !

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