Le pitch

Denny Malone est le roi de Manhattan North, le leader charismatique de La Force, une unité d'élite qui fait la loi dans les rues de New York et n'hésite pas à se salir les mains pour combattre les gangs, les dealers et les trafiquants d'armes. Après dix-huit années de service, il est respecté et admiré de tous. Mais le jour où, après une descente, Malone et sa garde rapprochée planquent pour des millions de dollars de drogue, la ligne jaune est franchie.

Le FBI le rattrape et va tout mettre en oeuvre pour le force à dénoncer ses coéquipiers. Dans le même temps, il devient une cible pour les mafieux et les politiques corrompus. Seulement, Malone connaît tous leurs secrets.

Et tous, il peut les faire tomber...

Mon avis

Histoire d'une double lecture ou Comment et pourquoi donner une seconde chance à un livre.

Avec les romans de Don Winslow, cela a toujours un peu été l'ascenseur émotionnel pour le lecteur compulsif que je suis.

Ma relation littéraire avec l'auteur américain a commencé par un chef d'oeuvre, rien de moins. Ce masterpiece, c'est La griffe du chien. Énorme polar/thriller américano/mexicain, bourré d'adrénaline, de révélations quasi journalistiques, au style nerveux. Brillantissime.

Mais avant, chronologiquement, Don Winslow a été écrit une série d'enquêtes du détective Boone Daniels, surfeur émérite sur le Pacifique. Des polars que je qualifierais de gentillets, mais c'est tout.

Et ensuite, l'auteur a publié Cartel, la  suite de La griffe du chien, qui reprend le même procédé (thriller/Mexique/drogue), sauf que le pavé s'est révélé répétitif et vraiment trop gratuitement gore pour mon goût.

Et encore après, Missing New York, polar traditionnel, sympa, mais c'est tout.

Et voilà enfin, Corruption. Gros lancement, grosse promo, excellentes critiques professionnelles et avis très favorables des lecteurs.

En 2019, première tentative pour lire Corruption. J'ai alors eu l'impression de ne pas lire le même livre qu'eux, au point que je n'ai pu le terminer, tant l'histoire m'avait paru prévisible, les personnages un peu caricaturaux, et le style direct, trop parlé.

Et puis récemment, cinq ans plus tard, j'ai repris ce pavé, pour lui donner une seconde chance.

Et cette fois-ci, je n'ai pas lâché l'affaire, séduit par cette histoire pleine d'aigreurs, de regrets et de tristesse.

Comme quoi, je dois être un lecteur à deux faces, comme beaucoup.

Et s'il y a une moralité à tirer de cette double lecture c'est que, au delà de la qualité intrinsèque d'une oeuvre, c'est bien votre cerveau, lecteur, qui lui donne vie !

Le thème de Corruption, c'est celui de la corruption des flics.

Cela se passe à New York, cela pourrait être à L.A.  Un thème usé jusqu'à la corde par tant de romans et de films.

Don Winslow ne s'en cache pas, d'ailleurs, en indiquant l'influence déterminante de l'époustouflante série The shield sur la naissance et le développement de son roman.

En fait, Corruption s'inspire carrément de la série, et il se dégage de la lecture de son polar la même impression de malaise, de tristesse, l'impression d'un immense gâchis réalisé par les principaux personnages.

Denny Malone, le "héros" du roman, un policier d'élite, un héros parmi les siens, est devenu au fil des années un pourri, corrompu, qui peu à peu s'est éloigné de sa vocation - défendre les gens, lutter pour la renaissance de New-York, la ville dont il est amoureux plus que de sa femme et ses enfants - au point de la renier.

Comment ? Winslow montre comment tout cela s'est fait, peu à peu, par une série de faiblesses, de petits reniements.

Et Malone n'est pas qu'un flic corrompu : pour sauver sa peau, il va aussi devenir un pourri, une balance, prêt à détruire la vie de ses collègues, ses frères, pour sauver sa peau.

Jusqu'à quel point ? C'est ce que raconte Corruption qui, avec ses scènes brutales, réalistes ces dialogues au couteau, entraine son personnage principal, mais aussi le lecteur jusqu'au bout de l'enfer.

Accrochez-vous : c'est du lourd du brutal. Presque aussi magistral que The shield, c'est tout dire !