Le pitch

« Le Swan Motel, de l'autre côté de la rue, était propre et frais – draps amidonnés, moquette beige, serviettes de toilette blanches et décentes que nous envoyions deux fois par semaine à Ottawa City, pour les faire laver, dans un camion plein de sacs-poubelle en plastique vert olive. Derrière le motel, la Suspicious River roulait ses flots noirs... »

Hyperréalisme, violence et crudité, transfigurés dans un univers poétique d'une force exceptionnelle, Kasischke n’est pas sans rappeler le grand Hopper et les meilleurs cinéastes américains. Mais surtout, elle fait du lecteur un voyeur fasciné, véritable héros de cette entreprise.

Mon avis

Petit avertissement préalable : ce livre comporte de très nombreuses scènes de violence psychologique impliquant une enfant, ainsi que de sexe et de violence explicite.

Doté d'une grande sensibilité ? Alors passez votre chemin, ami lecteur, ce roman n'est pas vous !

Ceci dit, difficile de rester indifférent devant ce roman de Laura Kasischke, auteure américaine. Un premier roman (publiée en 1996) assez étonnant.

Pendant l'exacte première moitié du récit, j'ai suivi cette histoire terrible avec une sorte de fascination particulière, sans nulle doute provoquée par la subtilité de l'exposition narrative, tout autant que par la qualité de l'écriture.

Laura Kasischke est avant tout une poétesse, et cela se voit et se ressent, tant elle jongle avec subtilité avec les couleurs, les lumières et les odeurs !

Alternance systématique entre scènes contemporaines où Leila, l'héroïne, vit une morne existence de réceptionniste de motel, et scènes de son enfance.

Seulement, rien ne se déroule normalement.

Car la réceptionniste se prostitue. Et l'enfant assiste au massacre cruel du couple de ses parents, avec sa mère et son oncle qui trompe son père sous ses yeux de petite fille. Avant que tout ne dégénère.

Assez vite, le lecteur comprend que les terribles dysfonctionnements comportementaux de la jeune femme ne sont que la conséquence de ses épouvantables traumas d'enfant, et l'on voit la situation se dégrader. Présent et passé, tout sombre dans le pire des cauchemars.

Le récit est vraiment fascinant, tant l'auteure jongle avec son personnage avec subtilité.

Malheureusement, le roman - sans doute parce que c'était un premier roman -, s'il reste extrêmement maitrisé, est beaucoup trop long, et la deuxième partie du texte devient pénible.

Parce que j'ai très vite compris le piège qui est en train de se refermer sur l'héroïne.

Et parce que les scènes deviennent redondantes et parfois insupportables, inutilement glauques, parfaitement sordides.

Quel dommage que l'auteure n'ai pas su réduire son manuscrit d'une centaine de pages : il aurait alors été parfait !

N'hésitez cependant pas à tenter votre chance : la spécificité de ce roman le mérite largement.