Le pitch

Les premières Rubrique-à-brac font leur apparition dans Pilote le 11 janvier 1968.

Gotlib donne naissance à de multiples personnages restés dans toutes les mémoires. Aux côtés de Newton, le lecteur retrouve l'inénarrable Coccinelle et le savant-professeur Burp ou bien encore Tarzan et le Petit Chaperon Rouge, sans oublier les policiers Bougret et Charolles.

*

*

Véritable banc d'essai, ces Rubrique-à-brac imposent Marcel Gotlib comme l'un des pionniers de la bande dessinée pour adultes.

Il abandonne cette série en 1972.

Mon avis

Après s'être fait la main et la plume, comme dessinateur, sur la série des Dingodossiers, avec Goscinny pour les textes (on peut trouver pire comme mentor !), Gotlib se lance seul, en 1968 (tout un symbole...) dans l'aventure de la Rubrique-à-brac.

Et c'est tout de suite une réussite formidable.

Si, sur la forme, il garde exactement le principe de construction des Dingodossiers (des sujets divers- tout et surtout n'importe quoi - traités sur des double pages, même s'il s'affranchira peu à peu de cette distance pour des séquences plus longues), Gotlib prend alors un double risque.

*

*

Le premier, c'est d'écrire ses propres textes.

Et le résultat est époustouflant car, il faut le dire même si c'est un crime de lèse-majesté, l'élève dépasse largement le maître : dans l'humour déconnant, absurdité, dérapages, détournement, Gotlib va bien plus loin que Goscinny.

Car - c'est le second risque qu'il prend - si le petit Marcel garde (et gardera tout au long de sa carrière) un humour bon enfant, plutôt gentil sur le fond, il ose beaucoup, beaucoup plus dans la transgression que son mentor.

Au détour de certaines planches, le lecteur perspicace peu déjà voir poindre les indices de ce que sera, plus tard, l'esprit Echo des savanes, puis Fluide Glacial (deux créations de Gotlib, je le rappelle !), les dérapages contrôlés de Pervers Pépère et, beaucoup moins contrôlés, de Rhaa Lovely.

*

*

Je ne vais pas citer ici tout ce que l'on peut trouver dans les 450 planches de la série (le premier tome présenté ici fait 90 planches bourrées de texte), mais il faut rappeler tout de même ce qu'à créé Gotlib, et dont vont s'inspirer plusieurs générations d'artistes.

Tout d'abord, il y a le principe du running gag, que Franquin développe en parallèle avec Gaston Lagaffe mais que Gotlib poussera jusqu'à l'absurde.

Venir, revenir et rerevenir sur les mêmes personnages, les mêmes jeux de mots, les mêmes attitudes, c'est ce qu'il fait à longueur de planche, avec des personnages récurrents qui marqueront l'histoire : Isaac Newton et la Coccinelle en sont les meilleurs exemples.

*

Ensuite, il va reprendre le principe du magasine américain Mad de la parodie, pour en faire quelque chose de beaucoup plus fort : le détournement.

Les meilleurs séquences de la Rubrique, ce sont les contes, de fées ou autres, qui débutent presque normalement, pour s'achever vers quelque chose de totalement improbable, avec une morale à la mord-moi-l'noeud (La cigale et la fourmi dans le tome 1, par exemple, ou Pinocchio, dans le tome 2).

Ce sont, d'autre part, les études scientifiques menées par un savant en blouse blanche qui, avec un sérieux imperturbable, va se lancer dans une analyse entomologique totalement débile...

Pour terminer, je ne peux pas ne pas mentionner ici la qualité graphique de chaque vignette de cette saga. Gottieb était un maître-dessinateur, à placer à côté de Franquin ou Uderzo.

La Rubrique-à-brac est indispensable à toute bibliothèque idéale, que l'on aime, ou pas, l'humour en bande dessinée. A lire, relire et offrir autour de soi.