Le Dieu-Fauve
Dargaud
Le Dieu-Fauve
Dargaud
Le pitch
Remontez jusqu’à l’ère lointaine du Déluge, celle qu’évoquent à demi-mots tous les textes anciens de l’humanité... En ces temps de famine, Sans-Voix, un jeune singe orphelin, cherche à prouver sa valeur à son clan d’adoption en chassant le « longue-gueule », un vieil alligator blessé et vicieux. Manger ou être mangé : le cycle immuable de la nature. Mais en osant s’aventurer au cœur des terres interdites, celles des humains, Sans-Voix sera confronté au plus cruel des destins : voir les siens massacrés sous ses yeux avant d’être capturé puis dressé dans les arènes de l’Empire afin de devenir un « Dieu-Fauve », un guerrier sacré façonné pour la violence et l’art du combat.
Mais ces longues années de souffrance auront surtout fait grandir en lui une brûlante obsession : se venger de ses bourreaux, quel qu’en soit le prix.
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Mon avis
Un des objectifs de la lecture est de vous sortir de vous-même, vous éloigner du monde dans lequel vous vivez tous les jours pour vous entrainer... ailleurs.
Malheureusement, rien de plus difficile que d'y parvenir car les livres suffisamment puissants, exotiques, étranges pour vous aspirer dans cet ailleurs sont bien peu nombreux.
Coup de chance : voilà, sous mes yeux écarquillés - et bientôt sous les vôtres, j'espère - un album qui remplit exactement cette mission.
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L'histoire du Dieu-Fauve, un one shot d'une centaine de planches, transporte le lecteur dès les premières vignettes dans cet ailleurs qu'ont fréquenté au cours des siècles précédents les grands auteurs de contes fabuleux, fantastiques, fantasy.
La première vignette - ces espèces de baobabs moribonds tordus puissamment vers le ciel - donne la tonalité de ce conte.
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Le narrateur - une voix off, qui ouvre et clôturera l'histoire - déroule une histoire terrible, une histoire de peur, de guerre, de territoires et de pouvoirs, entre deux races de primates, l'une humanoïde, l'autre plus proche du singe.
Spontanément, c'est un rapprochement avec le chef-d'oeuvre de Laurent Gaudé La mort du roi Tsongor qui m'est venu à l'esprit.
Cette manière de déclamer, à l'antique, un récit qui voit les destins s'entrechoquer.
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La qualité d'imagination, mais surtout d'écriture, de Fabien Vehlmann (que j'ai déjà croisé par le passé dans des albums au style et aux thèmes à chaque fois très différents) est portée, projetée par le dessin et la mise en couleurs de Roger (patronyme complet : Roger Ibáñez Ugena), un illustrateur espagnol au style réaliste d'une puissance assez bluffante.
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Du début à la fin, c'est violent, cruel, fascinant.
Happé par le conte, je n'ai pas levé la tête de l'album avant d'avoir tourné la dernière page pour émerger enfin de cet ailleurs.
Chaudement recommandé, une très grande réussite.
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