Le pitch

«Monsieur Lambert, héros de cet album, est l'un des personnages secondaires de cette humanité monotone et multiple ; l'un parmi d'autres dont Sempé a voulu - sous sa loupe - suivre attentivement la vie quotidienne, dans toute sa banalité, avec ce qu'elle comporte de drôlerie poétique et de mécanique, de généralement humain et de précisément français, d'éternel et de daté.

En s'attachant à ce personnage, en le suivant jour après jour, l'humoriste pourrait sembler s'approcher (pour une fois) du genre de la "bande dessinée". La forme qu'il invente est bien plus originale et personnelle : véritable petit roman illustré, où s'enchaînent scènes et tableaux, sans aucune nécessité d'intrigue ni de narration. D'un comique totalement moderne, le récit est aussi dépourvu d'effets spectaculaires que la vie réelle, comme celle-ci il est accompagné par une abondance de vains dialogues au ton impassible que ne renierait pas Harold Pinter.

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Mon avis

Je ne vais pas passer ici deux heures à encenser le formidable auteur qu'était Jean-Jacques Sempé, ce serait inutile (allez voir, sur ce site, quelques critiques de ses livres), je suis certain que vous faites déjà partie de ses admirateurs inconditionnels !.

Droit au but : mon objectif aujourd'hui est de vous faire découvrir cet album, qui n'est pas forcement identifié, un demi-siècle après sa publication, comme un des "best off" de Sempé.

Il faut dire que le format utilisé pour développer L'ascension sociale de Monsieur Lambert est très inhabituel.

La première édition de l'album, chez Denoël, en 1975, consiste en assez fort volume, format à l'italienne, jolie couverture en couleurs (c'est celui-ci qui figure dans une de mes bibliothèques).

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L'édition originale de l'album (1975)

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A l'intérieur, 106 planches occupées chacune par un dessin unique en noir et blanc, comportant à sa base un texte récitatif racontant et commentant l'histoire, le dessin lui-même étant pourvu d'un nombre considérable de personnages et de bulles de dialogues.

Dans les éditions ultérieures de l'oeuvre, celle-ci a perdu ses grandes dimensions et son joli format à l'italienne, ce qui est fort dommage (je vous encourage à traquer un exemplaire d'occasion de l'édition originale).

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L'histoire de Monsieur Lambert c'est, sous couvert du récit de la vie professionnelle de ce brave cadre moyen, tout simplement une sorte de synthèse de la vie des capitalistes bourgeois à la fin des trente glorieuses.

La petite vie française d'avant-guerre disparait peu à peu sous les mirages du progrès, des grands édifices et des grandes entreprises qui menacent la survie même  de l'écosystème social français traditionnel.

L'homme, sorti de son train-train, est pris par le progrès, l'ambition, la quête de la réussite.

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Mais sa nature, submergée par des évènements qui dépassent ses capacités culturelles, n'évolue finalement qu'à la marge, car il reste au fil du temps un petit bourgeois niché dans le confort de son milieu et de ses certitudes.

L'ascension sociale porte  - comme toujours chez Sempé - un regard ironique et comique sur ses personnages tout en gardant une part de tendresse bienveillante.

Monsieur Lambert est un homme occidental des 70's, qui vit, déjeune, joue, travaille avec ses semblables, d'autres hommes des 70's.

Il est petit, parfois un peu pitoyable, mais jamais méchant. C'est un homme de son temps, qui a de l'ambition, mais pas trop, tout juste à la hauteur de ses faibles moyens.

N'hésitez pas une seconde : l'oeuvre comporte plus de texte que la quasi totalité des créations de Sempé et permet ainsi de découvrir à quel point l'homme était, au delà d'un exceptionnel illustrateur, un grand romancier. Chapeau bas !