Dans le grand cercle du monde
Le livre de poche
Dans le grand cercle du monde
Le livre de poche
Le pitch
Au XVII° siècle, dans les espaces sauvages du Canada, les voix d’un jeune jésuite français, d’un chef de guerre huron et d’une captive iroquoise tissent l’écheveau d’une fresque où se confrontent les traditions et les cultures.
Trois personnages réunis par les circonstances, divisés par leur appartenance. Car chacun mène sa propre guerre : l’un pour convertir les Indiens au christianisme, les autres, bien qu’ennemis, pour chasser ces « Corbeaux » venus prêcher sur leur terre.
Mon avis
Les romans historiques consacrés aux "natifs", ces indiens d'Amérique (Etats-Unis, Canada) qui se sont fait décimer peu à peu par les conquérants européens, sont nombreux.
Je vous invite à ce propos à découvrir sur le site l'article que j'ai consacré au Racisme : les grands livres américains sur les minorités noires et indiennes.
Certains de ces romans sont de grands textes : ce sont ceux qui ont su aller au delà des stéréotypes développés par l'histoire officielle américaine, pour plonger dans la culture des indiens, incroyablement différentes de la nôtre.
En lisant (dans des styles et des contenus complètement différents) des récits comme Le fils de Philip Meyer, La captive aux yeux clairs d'A.B. Guthrie, Les chroniques d'Alvin le faiseur d'Orson Scott Card, vous pourrez découvrir la réalité du quotidien de la vie des grandes tribus, du XVII° au XIX° siècle.
Mais c'est surtout avec le roman formidablement bien documenté de Joseph Boyden que l'amateur d'histoire en apprendra le plus sur cette civilisation fascinante.
Disons le tout net : le très épais récit de l'auteur canadien (anglophone) m'a fait passer par tous les stades d'émotion que peut ressentir un lecteur en découvrant un tel roman.
Emotions positives, tout d'abord.
Curiosité intellectuelle et fascination lorsque Boyden prend tout son temps pour évoquer la conquête de ce qui n'est pas encore le Canada, mais une province, par les explorateurs français et par les jésuites chargés d'évangéliser les populations locales.
Mais le principal intérêt de Dans le grand cercle du monde, c'est l'impressionnante documentation recueillie sur la vie des Hurons.
Véritable plongée dans la vie au fil des jours, des mois et des années de ces populations animistes, le récit évoque avec forces détails la société indienne, ses moeurs, sa façon de vivre et de se nourrir (chasse, bien sûr, mais aussi et surtout agriculture !) mais aussi ses rapports avec l'extérieur (les autres tribus, les étrangers).
C'est souvent passionnant, souvent surprenant, inattendu... mais aussi parfois déconcertant.
A ce sujet, j'avoue avoir été troublé, perturbé, puis finalement complètement écœuré par la manière dont l'auteur décrit les traditions indiennes particulièrement liées au combat, avec les tortures épouvantables infligées à leurs adversaires.
Que Joseph Boyden n'épargne au lecteur aucune de leurs traditions cruelles, c'est une chose, d'autres auteurs ont déjà raconté le rapport très particulier que certaines tribus indiensne pouvaient avoir avec la douleur et la torture (voir les titres évoqués plus haut).
Mais l'auteur entretient un rapport vraiment malsain avec le sujet, revenant à de multiples reprises et de manière extrêmement complaisante sur des descriptions de torture interminables, avec force détails. Insupportable et inutile.
Sur un tout autre plan, la construction du roman en trois récits à la première personne entremêlés parait dans un premier temps judicieux, puisqu'on "entend" successivement le récit d'un chef indien, d'un père jésuite, puis d'une enfant iroquoise prisonnière des hurons.
Pourtant, très vite, j'ai été complètement déconcerté par le parti pris (volontaire j'imagine) de Joseph Boyden d'adopter le même ton, le même style, pour les trois personnages.
Quasiment la même façon de parler, la même syntaxe, le même vocabulaire, ce qui est totalement absurde et irréaliste : un chef huron ne parle pas comme un jésuite ?!!
Enfin, je dois revenir sur ce que j'appelle le syndrome Stephen King : la propension d'un nombre important d'auteurs d'Amérique du nord à écrire des romans interminables.
Ici, 700 pages denses pour une histoire au scénario ma foi fort ténu, c'est beaucoup, beaucoup trop, et je dois bien avouer que les 200 dernières pages (au scénario prévisible) m'ont paru bien superfétatoires (sans compter que je n'ai pas apprécié du tout le sort final réservé aux "héros" du roman).
Résultat des courses : même si le corps du roman m'a parfois séduit, j'ai trop souvent soupiré devant les facilités, problèmes de style, longueur des développements, ou grimacé devant les horreurs des scènes de torture pour ne pas refermer finalement le volume avec un sentiment d'insatisfaction. Dommage.
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