Le pitch

À la veille de la Seconde Guerre mondiale, Felix Kersten est spécialisé dans les massages thérapeutiques. Parmi sa clientèle huppée figurent les grands d'Europe. Pris entre les principes qui constituent les fondements de sa profession et ses convictions, le docteur Kersten consent à examiner Himmler, le puissant chef de la Gestapo. Affligé d'intolérables douleurs d'estomac, celui-ci en fait bientôt son médecin personnel.

C'est le début d'une étonnante lutte, Felix Kersten utilisant la confiance du fanatique bourreau pour arracher des milliers de victimes à l'enfer. Joseph Kessel nous raconte l'incroyable histoire du docteur Kersten et lève le voile sur un épisode méconnu du XXe siècle.

Mon avis

Les mains du miracle ne fait pas partie des oeuvres les plus connues de Joseph Kessel, loin de là.

Ce n'est même pas le livre le plus célèbre de l'auteur consacré à la seconde guerre mondiale (n'hésitez surtout pas à lire L'armée des ombres, ce récit bouleversant consacré à la résistance française).

De même, je pense que 99 % des gens n'ont, comme moi, jamais entendu parler de Felix Kersten, et de l'œuvre immense de sauvetage qu'il faut mettre à son crédit, grâce à l'influence que l'homme, un médecin spécialisé dans les massages thérapeutiques, a eu sur Himmler.

On parle depuis toujours d'Oscar Schlinder, l'homme qui sauva plus de 1 000 juifs des camps de concentration, alors même que Kersten a probablement participé au sauvetage d'un nombre infiniment plus élevé de victimes du nazisme. Hasards de la notoriété historique...

Grâce à ce récit, qui n'est pas un roman mais plutôt une sorte de reportage journalistique, comme Kessel en a écrit toute sa vie, vous risquez donc de découvrir, comme je l'ai fait, l'incroyable histoire de Felix Kersten et de son rôle dans le destin de centaine de milliers de personnes.

Le livre est tout à la fois stupéfiant, bouleversant, renversant d'intelligence, incroyablement riche en informations : bref : Les mains du miracle devrait être lu par tous.

Pour mieux comprendre, de l'intérieur, ce que furent les ressorts psychologiques du bras droit d'Hitler.

Pour toucher du doigt à quel point le monde fut, pendant quelques années, bouleversé par les errances et les faiblesses d'un homme a priori tout à fait ordinaire.

Himmler est le portrait même de l'horreur ordinaire. Au travers du personnage extraordinaire de Felix Kersten, il décrypte l'homme, le dévoile dans toute son 'in(humanité).

Rarement document historique m'aura autant appris sur les ressorts du régime nazi (et sur les divergences ayant pu exister au sein de ses dirigeants), mais aussi sur les détails de la fin de la seconde guerre mondiale et sur les tractations qui, quelques jours avant la fin, eurent lieu entre les représentants des alliés, ceux des instances juives, et un quarteron de nazis tentant de sauver leur peau.

Rarement, le sens de la narration de Kessel aura mieux fonctionné que dans ce livre.

L'auteur parvient à décrire de terribles instants, sans jamais tomber dans le pathos.

Et même s'il manque, parfois, quelques précisions historiques pour éclairer le cheminement de Kersten et Himmler (Kessel omet, par exemple, de décrire l'évolution au fil du temps des responsabilités du nazi dans l'appareil d'état allemand, mais aussi de parler de sa déchéance par Hitler, juste avant la fin), c'est à la lecture haletante d'un pan ignoré de l'histoire de la seconde guerre mondiale que je vous invite.

Surtout, surtout, n'hésitez pas...