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La littérature de science-fiction (SF) est née le jour où est apparu et s’est généralisé le progrès scientifique. Car à partir du moment où la science permettait de découvrir, de créer, de comprendre, cela signifiait que le monde allait changer dans le futur : la SF, c’est la littérature de l’avenir.
Grâce à la SF, la littérature a gagné en imagination, en complexité, en intelligence, en possibilités…
Grâce à la SF, le roman d’aventure a élargi son champs d’action de façon considérable, presque infini : champs géographique, mais aussi champs temporel.
Grâce à la SF, la prospective et la critique sociale et politique ont gagné en liberté, en richesse.
Voilà pourquoi la SF est la meilleure chose qui soit arrivée à la littérature au cours (globalement) de ce dernier siècle, avec la BD, bien entendu. Une bonne partie des meilleurs romans du XX° siècle sont des romans de SF, à n’en pas douter.
Voici ma sélection des romans de SF qui, pour moi, ont compté dans cette révolution. Comme d’habitude, c’est un choix purement subjectif, et même s’il comporte déjà plus de 70 titres, il n’est pas complet (du work in progress), je l’enrichie sans cesse.
Attention : vous ne trouverez ici que la littérature de science-fiction. Pas de fantasy, pas de fantastique. La SF, c’est la spéculation de ce qui pourrait arriver un jour dans notre réalité. Et si l’on y trouve quelques monstres (dont Frankenstein, pour moi le premier roman de SF d’entre tous), c’est qu’ils ont été créés grâce à la science.
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Les meilleurs romans de SF : la littérature de l’avenir
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Vers les étoiles – Mary Robinette Kowal (2020)
Folio SF – 576 pages – 9.70 €
Le pitch : 1952. Une météorite s’écrase au large de Washington, dévastant une grande partie de la côte Est des États-Unis et tuant la plupart des habitants dans un rayon de plusieurs centaines de kilomètres. Par chance, Elma York et son mari, Nathaniel, en congé dans les Poconos, échappent au cataclysme et parviennent à rejoindre une base militaire.
Elma, génie mathématique et pilote pendant la Seconde Guerre mondiale, et Nathaniel, ingénieur spatial, tentent de convaincre les militaires que la météorite n’a pu être dirigée par les Russes. Mais, ce faisant, ils découvrent que la catastrophe va dérégler le climat de manière irréversible et entraîner, à terme, l’extinction de l’humanité. Seule issue : l’espace. Une coalition internationale lance un programme spatial de grande envergure… inaccessible aux femmes. Elma compte pourtant bien y prendre part et devenir la première Lady Astronaute.
Mon avis : Vers les étoiles a recueilli en 2019 la totalité des grands prix internationaux de la SF dont les prix Locus, Nebula, Hugo.
il s’agit d’une uchronie rétrotemporelle. Vous savez, le genre d’histoire où l’on vous dit : mais que ce serait devenue l’humanité si, dans le passé, un évènement avait modifié le cours du temps ?
C’est ce qui se passe avec cet épais roman (560 pages) qui se déroule de 1952 à 1958 aux Etats-Unis, dans un pays touché par un cataclysme, une météorite géante qui s’abime au large de la côte est du pays et va, sur la durée, modifier profondément le climat de la Terre au point de la rendre inhabitable.
Pyramides – Romain Benassaya (2018)
Pocket – 624 pages – 8.95 €
Le pitch : 2182, des colons fuient la Terre devenue stérile dans une vingtaine d’immenses vaisseaux pour un voyage de deux cents ans. Toutes prennent la direction de Sinisyys, une autre planète bleue, dans le système 82 Eridani. Une seconde chance pour l’humanité. Mais à leur réveil d’un long sommeil en biostase, les occupants du Stern III ne se trouvent pas sur le nouvel Éden tant souhaité. Ici, point de voûte étoilée, et l’IA du vaisseau en panne ne peut leur donner aucune indication.
Les seuls indices que les passagers ont sont l’extraordinaire évolution de la forêt qui sert de poumon au vaisseau, et des Jardiniers – des pucerons génétiquement modifiés devenus scarabées. Combien de temps ont-ils bien pu passer en stase pour qu’une telle chose soit possible ? Et quel est cet environnement froid et noir, ressemblant à un tunnel aux proportions dantesques ?
Mon avis : Les bons livres de SF français contemporains sont suffisamment rares pour qu’on se réjouisse de la sortie de ce roman, le second de Romain Benassaya, un tout jeune auteur plein d’ambition.
Si je parle d’ambition, c’est parce que Benassaya a produit, non pas une pyramide entière (ha ! ha !), mais tout au moins un sacré pavé. 620 pages serrées où l’on ne s’ennuie quasiment pas une seconde, grâce à une technique de narration éprouvée, digne d’un vieux routier de la profession.
Vous en avez lu souvent, vous, des bouquins comportant 122 chapitres ? 122 séquences, pourrais-je dire, car Pyramides est construit comme un script de film, chaque chapitre correspondant à une séquence de l’histoire. Technique qui permet de donner un rythme très soutenu, constant, à toute la structure narrative.
Mais il ne suffit pas d’être capable de construire un bon squelette pour faire un bon livre, encore faut-il avoir des idées pour l’habiller. C’est là que l’auteur m’a vraiment convaincu.
Nous sommes Bob – Dennis E. Taylor (2016/2018)
Le livre de poche – 3 volumes*500 pages – 3*8.70 €
Le pitch : Bob Johansson vient de vendre sa start-up et va pouvoir profiter de la vie. Tant de lieux à visiter, de livres à lire et de films à voir ! Pas de bol, il se fait écraser en traversant la rue.
Lorsqu’il revient à lui, un siècle plus tard, c’est pour découvrir qu’il appartient désormais au gouvernement. Téléchargé dans un ordinateur, il est pressenti pour devenir une IA capable de se répliquer à volonté, aux commandes d’une sonde interstellaire destinée à la recherche de planètes habitables. Les enjeux sont considérables. S’il refuse cette mission, on l’éteindra et un autre prendra sa place. S’il accepte, il devient une cible de choix. Au moins trois autres puissances se verraient bien envoyer leur sonde en premier, et tous les coups sont permis.
Pour Bob, l’endroit le plus sûr, c’est dans l’espace, le plus loin possible de la Terre. C’est du moins ce qu’il croit…
Mon avis : Un drôle de titre (Nous sommes légion) pour le premier tome d’une trilogie au titre encore plus bizarre (Nous sommes Bob). [NB : Les deux volumes qui complètent la trilogie sont tout aussi étranges (Nous sommes nombreux et Tous ces mondes)]. Et pourtant, rarement un titre aura été aussi adapté au contenu du roman !
Le volume – 500 feuillets d’un vrai Tourne Page – débute de manière on ne peut plus bizarre… par la mort du personnage principal ! Mais Bob va survivre à sa mort, puisqu’il sert d’Intelligence Artificielle pour un projet scientifique destiné à sauver la race humaine sur le point de s’autodétruire.
Bob est envoyé dans l’espace pour trouver un point de chute aux survivants terriens. Doté de capacités et d’outils formidables, il va commencer à se reproduire lui-même et à essaimer dans toute le système solaire, puis la galaxie, afin de préparer l’arrivée des survivants.
L’histoire imaginée par Dennis E. Taylor, initialement programmeur de profession, est une vrai récit de geek. Cher lecteur potentiel, si vous êtes fan de hard science (ce courant de la littérature de SF qui privilégie les histoires assises sur des bases scientifiques), ce récit est pour vous : vous allez jubiler tout au long d’un scénario vif, structuré, et bourré de rebondissements.
Le pouvoir – Naomi Alderman (2016)
Calmann Levy/Le livre de poche – 512 pages – 6.70 €
Le pitch : ET SI LES FEMMES PRENAIENT ENFIN LE POUVOIR DANS LE MONDE ENTIER ?
Aux quatre coins du monde, les femmes découvrent qu’elles détiennent le « pouvoir ». Du bout des doigts, elles peuvent infliger une douleur fulgurante – et même la mort.
Soudain, les hommes comprennent qu’ils deviennent le « sexe faible ». Mais jusqu’où iront les femmes pour imposer ce nouvel ordre ?
Mon avis : Difficile de passer à côté de la couverture au graphique et au lettrage Art Déco/Bauhaus de ce roman de Naomi Alderman. Rouge vif ! Difficile également de passer à côté du court pitch. Et une fois que vous aurez ouvert le livre et entamé la lecture, difficile d’en sortir avant la fin des 500 pages !
Avec cette dystopie décoiffante (qui constitue le négatif absolu de La servante écarlate de Margaret Atwood), Naomi Alderman a obtenu le Baileys women’s prize for fiction 2017, un prix prestigieux couronnant le meilleur livre de l’année écrit en anglais par une femme.
Un prix attribué pour la première fois à une oeuvre de SF. Et c’est parfaitement mérité, car Le pouvoir est un livre dérangeant, puissant, parfois profondément choquant !
Prime time – Jay Martel (2015)
10/18 – 480 pages – 8.40 €
Le pitch : À l’insu de ses habitants, la Terre est depuis des décennies le programme de télé réalité le plus suivi par la galaxie qui se régale des aventures des Terriens, ces êtres primaires, aussi stupides qu’arrogants, qui, à force de guerres, de pollution, de décisions irrationnelles, s’approchent chaque année un peu plus de l’autodestruction. Leurs aventures sexuelles, religieuses, politiques ont souvent été irrésistibles. Puis, peu à peu, l’audience s’est mise à chuter. Les spectateurs se sont lassés.
Aussi les producteurs ont-ils décidé d’arrêter les frais. Et ils préparent en secret un dernier épisode : la fin du monde, prévue dans trois semaines. Un seul homme, bien malgré lui, va avoir la possibilité de sauver la planète.
Scénariste has been un peu déplumé et travaillé par une libido dévorante, Perry Bunt va en effet lever le voile sur la conspiration. Hélas pour nous, il n’a pas grand-chose d’un héros !*
Mon avis : Avec Prime Time, c’est un nouveau coup de maître pour la jeune et talentueuse maison d’Édition Super 8, qui s’est donné pour mission de dénicher les romans anglo-saxons de SF et fantastique les plus originaux. Pour Prime time, une référence s’impose d’emblée : H2G2, Le guide du voyageur galactique, bien sûr !
On est ici très exactement dans la même veine : une vraie histoire de SF, mais prise au 3e degré, avec un personnage principal complètement paumé et un humour digne des meilleurs auteurs anglo-saxons spécialistes du non-sens. Je prends ici le risque de m’engager (satisfait ou remboursé) : vous allez rire, et souvent aux éclats, en suivant les péripéties et les soubresauts scénaristiques incessants dans lesquels l’auteur plonge son pauvre héros !
Station Eleven – Emily St. John Mandel (2014)
Editions Rivages – 476 pages – 9.00 €
Le pitch : Dans un monde où la civilisation s’est effondrée, une troupe itinérante d’acteurs et de musiciens parcourt la région du lac Michigan et tente de préserver l’espoir en jouant du Shakespeare et du Beethoven.
Ceux qui ont connu l’ancien monde l’évoquent avec nostalgie, alors que la nouvelle génération peine à se le représenter. De l’humanité ne subsistent plus que l’art et le souvenir. Peut-être l’essentiel.
Mon avis : Si vous parvenez à prononcer le nom de la jeune auteure, n’hésitez pas à en parler autour de vous car, indubitablement, Emily St. John Mandel, fait partie des plumes à surveiller pour l’avenir.
Il n’y a qu’à voir comment, dans ce roman de « science-fiction » (on devrait plutôt utiliser le terme d’ « anticipation », comme on le faisait il y a un demi-siècle pour caractériser les romans qui parlent du futur), elle transcende complètement le thème classique, post-apocalyptique (que se passerait-il si tout le monde – ou presque – mourrait subitement) pour en faire une oeuvre littéraire à part entière, puissante, dérangeante…
Au départ pourtant, une idée cent fois rebattue : un virus, détruit 99.9999 % de la population mondiale. Quid des survivants ?
Le cercle – Dave Eggers (2013)
Folio – 576 pages – 8.90 €
Le pitch : Quand Mae Holland est embauchée par le Cercle, elle n’en revient pas. Installé sur un campus californien, ce fournisseur d’accès Internet relie les mails personnels, les réseaux sociaux, les achats des consommateurs et les transactions bancaires à un système d’exploitation universel, à l’origine d’une nouvelle ère hyper-numérique, prônant la civilité et la transparence.
Alors que la jeune femme parcourt les open-spaces, les immenses cafétérias en verre, les dortoirs confortables pour ceux qui restent travailler le soir, la modernité des lieux et l’intense activité la ravissent. On fait la fête toute la nuit, des musiciens célèbres jouent sur la pelouse, des activités sportives, des clubs et des brunchs sont proposés, et il y a même un aquarium contenant des poissons rares rapportés par le P.-D.G. Mae n’en croit pas sa chance de travailler pour l’entreprise la plus influente qui soit – même si le campus l’absorbe entièrement, l’éloignant de plus en plus de ses proches, même si elle s’expose aux yeux du monde en participant au dernier projet du Cercle, d’une avancée technologique aussi considérable qu’inquiétante
Mon avis : Attention : ne vous fiez pas superficiellement au thème affiché dans les trois premiers paragraphes du pitch, ni à quelques critiques publiées en ligne par quelques jeunes lecteurs, passés complètement à coté du contenu du livre ! Ce roman n’est pas une oeuvre pour ados, un enième développement SF « à suspens » à la Hunger games, ou « Le labyrinthe ».
Ouvrez plutôt vos mirettes pour lire la phrase suivante : Le cercle est certainement la meilleure dystopie publiée depuis de nombreuses années !
Un roman que toute personne avisée devrait avoir lu avant de replonger dans le monde virtuel proposé par les GAFA, les réseaux sociaux, et de manière plus générale, par tout ce qu’implique la généralisation de l’outil internet !
Une pluie sans fin – Michael Farris Smith (2013)
10/18 – 432 pages – 5.99 €
Le pitch : Après des années de catastrophes écologiques, le sud des États-Unis, de la Louisiane à la Floride, est devenu un véritable no man’s land. Plutôt que de reconstruire sans cesse, le gouvernement a tracé une frontière et ordonné l’évacuation de la zone. Au sud de la Ligne se trouve désormais une zone de non-droit ravagée par les tempêtes et les intempéries incessantes, sans électricité, sans ressources et sans lois.
Cohen fait partie des rares hommes qui ont choisi de rester. Incapable de surmonter la mort de sa femme et de l’enfant qu’elle portait, il tente tant bien que mal de redonner un sens à sa vie, errant sous une pluie sans fin.
Des circonstances imprévues vont le mettre en présence d’une colonie de survivants, menée par Aggie, un prêcheur fanatique hanté par des visions mystiques. Celui-ci retenant contre leur gré des femmes et des enfants, Cohen va les libérer et tenter de leur faire franchir la Ligne. Commence alors un dangereux périple à travers un paysage désolé, avec pour fin l’espoir d’une humanité peut-être retrouvée.
Mon avis : Une pluie sans fin a parfois été, comparé à La route, de Cormac Mac Carthy, ce chef-d’oeuvre incontestable. Alors bien sûr, ce n’est pas exactement le même niveau, notamment parce qu’il manque à ce roman la dimension métaphysique de son glorieux aîné, mais… Trois points rapprochent les deux romans.
Le premier, c’est le cadre : un roman post apocalyptique, où l’homme survivant tente de survivre sur une Terre en parte détruite après une catastrophe.
Le second, c’est le style. Farris Smith n’arrive pas à l’ascétisme foudroyant de Mc Carthy, mais… on n’en est pas loin.
C’est de l’extra dry, un comble pour un roman qui patauge dans l’eau de la première à la dernière page !
Silo – Hugh Howey (2011)
Folio – 448 pages – 8.20 €*
Le pitch : Dans un futur post-apocalyptique indéterminé, quelques milliers de survivants ont établi une société dans un silo souterrain de 144 étages. Les règles de vie sont strictes. Pour avoir le droit de faire un enfant, les couples doivent s’inscrire à une loterie. Mais les tickets de naissance des uns ne sont redistribués qu’en fonction de la mort des autres.
Les citoyens qui enfreignent la loi sont envoyés en dehors du silo pour y trouver la mort au contact d’un air toxique. Ces condamnés doivent, avant de mourir, nettoyer à l’aide d’un chiffon de laine les capteurs qui retransmettent des images de mauvaise qualité du monde extérieur sur un grand écran, à l’intérieur du silo.
Ces images rappellent aux survivants que ce monde est assassin. Mais certains commencent à penser que les dirigeants de cette société enfouie mentent sur ce qui se passe réellement dehors et doutent des raisons qui ont conduit ce monde à la ruine.
Mon avis : « Il n’y a pas de mal à se faire du bien », ai-je pensé en achetant le très épais roman intitulé Silo, avec cette couverture rouge orange assez impressionnante. C’est ce que je me dit souvent lorsque je me lance dans la lecture d’un bon gros roman d’aventure ou de science-fiction, avec l’espoir souvent déçu, mais éternellement renouvelé, de tomber sur le récit qui va m’emporter loin et longtemps de la réalité.
Avec Silo, mes espoirs ont été plutôt récompensés car oui, indubitablement, il s’agit d’un roman de SF « à l’ancienne », tel que les grands auteurs américains « populaires » en produisaient à la chaîne dans les années 40 et 50. Tout concours, en réalité, à faire de ce texte contemporain – qui a remporté un énorme succès populaire (en eBook puis en livre « papier ») – une sorte d’anomalie littéraire temporelle.
Le déchronologue – Stéphane Beauverger (2009)
Folio SF – 576 pages – 9.70 €
Le pitch : « Je suis le capitaine Henri Villon, et je mourrai bientôt. Non, ne ricanez pas en lisant cette sentencieuse présentation. N’est-ce pas l’ultime privilège d’un condamné d’annoncer son trépas comme il l’entend ? C’est mon droit. Et si vous ne me l’accordez pas, alors disons que je le prends ».
Ainsi débute le récit du capitaine Villon. Il lutte avec son équipage de pirates pour préserver sa liberté dans un monde déchiré par d’impitoyables perturbations temporelles. Son arme : le Déchronologue, un navire dont les canons tirent du temps.
Mon avis : J’avoue n’avoir pas toujours accordé beaucoup d’attention à la SF française. Sans doute par erreur, ou par manque de chance, faute d’avoir croisé de grands textes.
Voilà pourtant le parfait contre-exemple de cette situation : Le déchronologue est un roman absolument unique et remarquable, que je conseille à tout ceux qui, comme moi, ont longtemps cherché l’oiseau rare.
Il faut dire que Stéphane Beauverger est parvenu à croiser deux genres a priori fort éloignés : la SF et… le roman de pirates !
Imaginez un Stevenson qui aurait travaillé avec H.G. Wells, pour créer un récit hors norme, un L’île au trésor carambolé avec La machine à remonter le temps…
La route – Cormac Mc Carthy (2006)
Points – 256 pages – 7.00 €
Le pitch : L’apocalypse a eu lieu. Le monde est dévasté, couvert de cendres et de cadavres. Parmi les survivants, un père et son fils errent sur une route, poussant un caddie rempli d’objets hétéroclites.
Dans la pluie, la neige et le froid, ils avancent vers les côtes du Sud, la peur au ventre : des hordes de sauvages cannibales terrorisent ce qui reste de l’humanité. Survivront-ils à leur voyage ?
Mon avis : Prix Pulitzer 2007.
Ce roman post-apocalyptique est un chef d’oeuvre terrifiant, qui ne manquera pas, j’en suis certain, d’inspirer indirectement quelques films d’horreur qui sauront en détourner les codes.
L’écriture blanche (comme le paysage, couvert de cendres) de McCarthy est somptueuse ; elle se développe dans un contexte qui en démultiplie les effets. C’est une écriture « à l’os », qui vous prend là, de part et d’autre du larynx, et qui vous étouffe peu à peu. À la fin, vous avez des visions, par manque d’air, et vous voyez… la route.
Sans vous la révéler, bien entendu, je préciserais que la fin du roman est, dans son évidente simplicité, une des plus poignantes que l’on puisse imaginer pour un livre.
World War Z – Max Brooks (2006)
Le livre de poche – 544 pages – 8.30 €
Le pitch : La guerre des zombies a eu lieu, et elle a failli éradiquer l’ensemble de l’humanité. L’auteur, en mission pour l’ONU – ou ce qu’il en reste – et poussé par l’urgence de préserver les témoignages directs des survivants de ces années apocalyptiques, a voyagé dans le monde entier pour les rencontrer, des cités en ruine qui jadis abritaient des millions d’âmes jusqu’aux coins les plus inhospitaliers de la planète.
Jamais auparavant nous n’avions eu accès à un document de première main aussi saisissant sur la réalité de l’existence – de la survivance – humaine au cours de ces années maudites. Prendre connaissance de ces comptes rendus parfois à la limite du supportable demandera un certain courage au lecteur. Mais l’effort en vaut la peine, car rien ne dit que la Ze Guerre mondiale sera la dernière.
Mon avis : Une fois de plus, nous voilà confronté au problème d’une adaptation cinématographique qui cannibalise (en l’espèce, c’est vraiment le cas de le dire !) complètement la notoriété d’un excellent livre, au point que la plupart des gens ignore même que le livre a existé. Avec Worl War Z, que vous ayez aimé, ou détesté le film, même conseil : oubliez-le aussi vite ! Car à part quelques scènes évoquées, de-ci de-là, il n’a rien à voir avec le roman.
Roman ? Le terme paraît peu approprié puisque Max Brooks (oui ! Le fils de Mel ! Incroyable, non, c’est comme si le fils de Groucho – Marx, également ! – se lançait dans une série sur les vampires ?!) est construit comme un travail documentaire qui, sur le principe, pourrait être écrit par un historien ou un journaliste.
530 pages de documents – récits, interviews, compte-rendus – qui retracent, dans l’ordre chronologique, la guerre mondiale contre les zombies.
Ilium – Dan Simmons (2003)
Pocket – 896 pages – 13.00 €
Le pitch : Imaginez que les dieux de l’Olympe vivent sur Mars. Ils se déplacent librement dans le temps et l’espace grâce à leurs pouvoirs quantiques.
Leur plus grand plaisir, c’est la Guerre de Troie qui se joue sous leurs yeux. Pour y mettre un peu plus de piment, ils envoient des érudits terriens modifier les événements à leur gré, en gardant toutefois le récit d’Homère comme référence.
Mais en orbite autour de Mars, de petits observateurs surveillent les jeux divins…
Mon avis : Avec Dan Simmons, c’est souvent synonyme de montagnes russes : production très importante, avec des très bas, mais heureusement, surtout des sommets, parfois vertigineux.
Ilium est tout en haut, à côté de L’échiquier du mal ou Hypérion. Impossible de faire un résumé de l’intrigue en moins de deux pages, ni d’expliquer les raisons pour lesquelles ce roman au scénario et à l’imagination diabolique est un sommet sans revenir sur le détail de l’histoire.
Des milliards de tapis de cheveux – Andreas Esbach (1995)
L’Atalante – 316 pages – 19.00 €
Le pitch : Quelque part aux confins de l’Empire, sur un monde oublié de tous… une petite planète apparemment anodine.
Sauf que, depuis des temps immémoriaux, les hommes s’y livrent à une étrange occupation : tisseurs de père en fils, ils fabriquent des tapis de cheveux destinés à orner le Palais des Étoiles de l’Empereur. Pourtant, une étrange rumeur circule. On raconte ça et là que l’Empereur n’est plus. Qu’il serait mort, abattu par des rebelles.
Mais dans ce cas, à quoi peuvent donc servir ces tapis ? Et qui est cet homme si étrange qui prétend venir d’une lointaine planète ? Lui aussi affirme que l’Empereur est mort…
Mon avis : Des milliards de tapis de cheveux, le roman de d’Andreas Eschbach, un auteur allemand (avec une telle sonorité, vous vous en doutiez, n’est-ce pas ?!) date de 1995.
Il a fallu dix ans pour qu’il soit traduit en français (grâce à L’Atalante, grâce soit rendu à l’éditeur…) et vingt ans pour que, petit à petit, il émerge – par un pur effet de bouche-à-oreille – de la masse confuse de la production standard de la SF contemporaine, pour être enfin considéré comme une des pièces maîtresses récentes de cette littérature de genre.
Pourquoi tant de temps pour atteindre cette reconnaissance ? Je n’en est pas la moindre idée, mais je trouve que le phénomène est plutôt rassurant : il signifierait que la qualité finit toujours par être reconnu et récompensé !
La Trilogie martienne – Kim Stanley Robinson (1992-1996)
Omnibus – 1 664 pages – 32.00 €
Le pitch : Demain. Cent pionniers s’envolent pour Mars. Ils devront l’explorer, survivre sur cette planète usée et hostile.
Si l’homme ne peut s’y adapter, il faudra adapter Mars à l’homme :: créer l’atmosphère, bâtir les cités, transformer les déserts en prairies, la glace en océans. Par-delà les difficultés ou les conflits idéologiques, c’est un monde nouveau que l’on invente. Jusqu’à l’émancipation de la tutelle d’une Terre de moins en moins souveraine.
Kim Stanley Robinson a consacré presque deux décennies à ses recherches sur Mars, en abordant des domaines aussi variés que l’astrophysique, l’économie, la sociologie, la physique des matériaux ou la botanique. Cette Trilogie martienne, saluée dès sa parution comme une œuvre visionnaire, couronnée par les plus prestigieux prix littéraires (Hugo, Nebula, British SF Award, Locus, etc.) est ici réunie pour la première fois en un seul volume.
Mon avis : Trois romans (Mars la rouge, Mars la verte et Mars la bleue), 1 600 pages serrées (mais plus de 2 500 pages en format poche), pour raconter l’épopée de la conquête de Mars par les humains, leur installation, leur adaptation…
Exemple parfait du courant Hard science moderne dont elle est une des œuvres majeures, la trilogie est une performance littéraire et scientifique étonnante, où l’auteur – en digne fils spirituel d’Artur C. Clarke) explore longuement (certains disons trop longuement) tous les aspects du sujet.
Pour ma part, j’ai trouvé cela passionnant, même si la lecture de ce léviathan est clairement réservée à des lecteurs confirmés.
Fatherland – Robert Harris (1992)
Pocket – 448 pages – 6.95 €
Le pitch : Mardi 14 avril 1964 : la paix nazie règne depuis vingt ans en Europe et Berlin s’apprête à fêter l’anniversaire d’Adolf Hitler. Les juifs ont été expulsés quelque part, loin à l’est. Encore plus loin à l’est, en Sibérie, la guerre continue. Kennedy a annoncé sa venue en septembre : ce sera la première visite d’un président américain en Allemagne depuis le traité de paix de 1944.
L’inspecteur Xavier March enquête sur les meurtres de deux anciens hauts gradés SS. L’affaire est sensible, et March commence à subir des pressions. Mais il s’obstine, et, peu à peu, commence à entrevoir un secret énorme et monstrueux.
Mon avis : Dès sa sortie, en 1992, Fatherland a marqué l’histoire de la littérature prospective. Premier roman de Robert Harris, il créait alors une véritable onde de choc parmi les lecteurs puisque l’auteur situait ce thriller dans le proche passé d’un monde parallèle au nôtre, un monde où l’Allemagne nazie a gagné la second guerre mondiale et domine le monde.
En un instant, Fatherland montait dans le top 10 des uchronies les plus célèbres, au côté de son aîné, Le maître du haut château, de Philip K. Dick, auquel il fait étrangement résonance. Il faut dire que l’entreprise était osée, le sujet brûlant et l’expérience terriblement traumatisante.
Dès la première page, Harris plonge l’histoire dans le noir du désespoir le plus complet. Son personnage principal, Xavier March, va, au fil d’une enquête rapidement interdite par les autorités, lever peu à peu le voile du discours officiel sur de terribles secrets d’état.
Jurassic Park – Michael Crichton (1990)
Pocket – 512 pages – 7.90 €
Le pitch : Que s’est-il donc passé sur Isla Nublar, durant ces deux jours d’août 1989, pour obliger l’armée à venir « faire le ménage » ? Le programme dont cette île est le théâtre avait pourtant tout du paradis scientifique: un immense complexe naturel où s’ébattent, aux yeux de tous, les plus féroces sauriens du Jurassique, génétiquement ramenés à la vie…
Quelques jours avant le chaos, le paléontologue Alan Grant et Ian Malcolm, mathématicien de renom, chargés de délivrer une caution universitaire au projet, embarquent pour ce bout de terre perdu au large du Pacifique. Bientôt, le petit groupe invité par le créateur du parc doit se rendre à l’évidence: au cœur d’une jungle primitive et farouchement hostile, l’être humain n’est plus l’espèce dominante, mais la proie…
Et la science se révèle vite impuissante face à la sauvagerie d’un écosystème disparu, un monde oublié qui cherche à reprendre ses droits. Dès lors, l’évolution impose sa loi, unique, éternelle, terrifiante , survivre…
Mon avis : Michael Crichton est mort en 2008. Cet auteur restera comme un des acteurs majeurs du roman et du cinéma à grand spectacle des vingt dernières années du XX° siècle. Romancier, scénariste, réalisateur : on lui doit une épaisse poignée de romans et de films qui ont marqué cette génération.
Crichton est souvent considéré comme l’inventeur du techno thriller. Erreur : l’inventeur du techno thriller, c’est Jules Verne ! Ceci-dit, effectivement, Crichton a repris le flambeau du maître et entrepris de bâtir de solides romans d’aventures, haletants, s’appuyant avant tout sur d’importantes bases scientifiques.
Jurassic Park (puis sa suite, Le monde perdu) en est l’exemple le plus connu, et sans aucun doute le meilleur.
Hypérion – Dan Simmons (1989)
Pocket – 640 pages – 9.50 €
Le pitch : Sur Hypérion, planète située aux confins de l’Hégémonie, erre une terrifiante créature, à la fois adulée et crainte par les hommes : le Gritche. Dans la mystérieuse vallée des Tombeaux du Temps, il attend son heure…
À la veille d’une guerre apocalyptique, sept pèlerins sont envoyés sur Hypérion. Leur mission : empêcher la réouverture des Tombeaux. Ils ne se connaissent pas, mais cachent tous un terrible secret – et un espoir démesuré. Et l’un d’entre eux pourrait même tenir le destin de l’humanité entre ses mains.
Mon avis : Prix Hugo et prix Locus 1990, Hypérion est le premier volume du cycle des Cantos d’Hypérion, un chef-d’œuvre (un des chef-d’oeuvres, en fait !) de Dan Simmons.
Il faut absolument enchainer ce fort volume sur La chute d’Hypérion, tout aussi épais et tout aussi génial.
Folle inventivité, arborescence invraisemblable d’un univers d’une richesse qui n’a quasiment aucun équivalent dans l’histoire de la SF. Rien que ça.
L’homme des jeux – Iain M. Banks (1988)
Le livre de poche – 390 pages – 7.70 €
Le pitch : Dans l’empire d’Azad, le pouvoir se conquiert à travers un jeu multiforme. Jeu de stratégie, jeu de rôle, jeu de hasard, le prix en est le trône de l’Empereur.
Gurgeh est le champion de la Culture, une vaste société galactique, pacifique, multiforme, anarchiste, tolérante, éthique et cynique où le jeu est considéré comme un art majeur. S’il gagne, la paix sera sauvée entre la Culture et Azad. S’il perd…
Mon avis : Lorsque j’ai lu L’homme des jeux, le premier tome paru du Cycle de la Culture (mais en fait le second dans l’ordre chronologique d’écriture), j’ai tout de suite pensé que la SF s’était trouvé un nouveau maître.
Le parallèle entre les thèmes traités, le mode d’exposition, la richesse et l’ampleur de l’imagination, de Banks, d’une part, et Isaac Asimov dans son cycle de Fondation, d’autre part, écrit quarante ans auparavant, me paraît assez flagrant.
La servante écarlate – Margaret Artwood (1985)
Pavillon poche – 544 pages – 11.50 €
Le pitch : Devant la chute drastique de la fécondité, la république de Gilead, récemment fondée par des fanatiques religieux, a réduit au rang d’esclaves sexuelles les quelques femmes encore fertiles. Vêtue de rouge, Defred, » servante écarlate » parmi d’autres, à qui l’on a ôté jusqu’à son nom, met donc son corps au service de son Commandant et de son épouse. Le soir, en regagnant sa chambre à l’austérité monacale, elle songe au temps où les femmes avaient le droit de lire, de travailler…
En rejoignant un réseau secret, elle va tout tenter pour recouvrer sa liberté.
Mon avis : Avant qu’une com’ démente ne submerge en cette année 2017 les amateurs de littérature américaine, à propos de La servante écarlate, j’avoue n’avoir jamais entendu parlé de ce roman vendu par millions outre-Atlantique…
Étrange, étrange, lorsqu’un livre est publié par un éditeur français en format poche… trente ans après qu’il l’ait sorti en format broché (la publication de Robert Laffont date de 1987) ! Mais sans doute, est-ce dû à la sortie et à la diffusion récente de son adaptation en série télévisée. Terrible pouvoir que celui des séries, dont celui, bénéfique finalement, que de placer sous les feux des projecteurs une oeuvre qui, jusqu’à maintenant, n’avait pas reçu en France l’accueil qu’il méritait !
Car La servante écarlate, s’il est loin d’être l’immense chef-d’oeuvre que certains veulent bien y voir, est une excellente dystopie, au thème intéressant, qui présente le mérite insigne (et malheureusement assez rare) de faire réfléchir le lecteur.
La stratégie Ender – Orson Scott Card (1985)
J’ai lu – 380 pages – 6.90 €
Le pitch : Andrew Wiggin, dit Ender, n’est pas un garçon comme les autres. Depuis sa naissance, ses faits et gestes sont observés par l’intermédiaire d’un moniteur greffé dans son cerveau. Car ceux qui l’ont conçu ambitionnent de faire de lui rien de moins que le plus grand général de tous les temps, le seul capable de sauver ses semblables de l’invasion des doryphores.
Et alors qu’Ender suit pas à pas le dur chemin de son apprentissage de guerrier, ses créateurs mesurent la gravité de leur choix : en donnant naissance à un monstre, n’ont-ils pas damné l’humanité elle-même ?
Mon avis : Orson Scott Card est un des écrivains majeurs de la SF et de la Fantaisy contemporaines, mais il est avant tout connu pour ce roman (Prix Hugo et Prix Nebula lors de sa sortie) et pour le fait qu’il est mormon.
N’hésitons pas à la dire : La stratégie Ender est un chef d’oeuvre. Il s’agit d’un des meilleurs romans initiatiques que j’ai pu lire et relire (il est très rare que je relise) au fil du temps.
Qui a t-il de plus fascinant que de suivre un enfant franchir, peu à peu, toutes les étapes qui le mèneront à l’âge adulte ?
Contact – Carl Sagan (1985)
Pocket – 570 pages – 7.90 €
Le pitch : Jeune astronome convaincue de l’existence d’une vie extraterrestre intelligente, Ellie Arroway doit faire face au scepticisme de la communauté scientifique à l’égard du projet »Argus », un programme d’écoute spatiale installé au Nouveau-Mexique qu’elle et son équipe tentent par tous les moyens de sauver. Jusqu’au jour où leurs ordinateurs captent un message rationnel émis non pas depuis la Terre, mais depuis Véga, une lointaine étoile. Ellie se lance alors à coeur perdu dans son déchiffrage, pour découvrir qu’il s’agit des plans d’un véhicule censé permettre à des humains de voyager dans l’espace afinde rencontrer ceux qui nous les ont adressés. Or ces êtres semblent à présent impatients d’établir le contact : ils nous surveillent depuis longtemps, et le moment est peut-être venu pour eux de nous juger…
Mon avis : Roman passionnant écrit par Carl Sagan, universitaire vulgarisateur. On est donc plutôt dans la hard science, mais le traitement du sujet (parfois un peu aride) touche au merveilleux des contacts avec une race extraterrestre.
Roland Zemeckis adaptera le livre au cinéma de manière extrêmement convaincante (avec Jodie Foster).
Running man – Stephen King (1982)
Le livre de poche – 259 pages – 7.10 €*
Le pitch : Premier quart du XXIe siècle. La dictature s’est installée aux États-Unis. La télévision, arme suprême du nouveau pouvoir, règne sans partage sur le peuple. Une chaîne unique diffuse une émission de jeux suivie par des millions de fans : c’est « La Grande Traque ».
Ben Richards, un homme qui n’a plus rien à perdre, décide de s’engager dans la compétition mortelle. Pendant trente jours il devra fuir les redoutables « chasseurs » lancés sur sa piste et activement aidés par une population encouragée à la délation. Tous les moyens sont bons pour éliminer Ben Richards…
Mon avis : Ce Stephen King a été publié sous le pseudonyme de Richard Bachman, celui qu’il utilisait dans les années 80 pour ses romans « mineurs », et c’est le meilleur de cette série, et de loin, un peu un Marche ou crève en beaucoup plus réussi.
Présenté sous forme d’un compte à rebours, de 100 à 0, ce roman en a l’urgence. L’histoire est passionnante, la toile de fond SF très réussie (c’est d’ailleurs le seul vrai roman de SF de King), et l’écriture… d’une efficacité totale. Pour tout dire, le roman est presque trop court (250 pages) !
Titan (La trilogie de Gaïa T1) – John Varley (1980)
Folio SF – 418 pages – 8.80 €
Le pitch : Une gigantesque roue en orbite autour de Saturne est repérée par l’équipage du vaisseau spatial américain, le Seigneur des Anneaux.
Son caractère artificiel ne fait guère de doute lorsque… création ou créature, l’entité extraterrestre avale littéralement le vaisseau et ses astronautes.À l’intérieur de l’artefact, le capitaine Cirocco Jones et son équipage vont découvrir un monde démentiel peuplé d’anges et de centaures bavards, de baleines-zeppelins et de vers de sable ; avant de découvrir Gaïa, la divine créatrice de cet univers…
Mon avis : lisez le pitch : tout est dit. Titan est le premier tome d’une saga hallucinante, certainement la plus imaginative et spectaculaire de l’histoire de la SF.
Le roman a raflé tous les grands prix internationaux à sa sortie (Hugo, Locus, Nebula), et c’est mérité, car John Varley, aujourd’hui un peu tombé – injustement- dans les oubliettes, est un des plus merveilleux raconteurs d’histoire des 70’s et 80’s, un scientifique doublé d’un poète, avec une imagination et un humour hors catégorie.
Dans la catégorie « Découverte d’un écosystème artificiel extraterrestre », Titan se situe tout en haut du podium, partageant la première marche avec Rendez-vous avec Rama, du grand Arthur C. Clarke. Préparez-vous, avec ce premier volume, à voler de surprises en surprises, la bouche bée d’étonnement devant le pouvoir de création et l’imagination quasi sans limite de l’auteur.
Du tout et n’importe quoi, à première vue, et pourtant l’ensemble présente une cohérence scientifique assez admirable, et si vous avez un esprit cartésien, rationnel, vous vous étonnerez à valider les délires de John Varley.
Attention : Varley a été trop ambitieux et les tomes 2 et 3 (Sorcière et Démon), bien que tout à fait lisibles, sont un peu redondants, dans le genre « gros délire ». Moralité : lisez Titan, le roman se suffit à lui-même !
La compagnie des glaces – G.J. Arnaud (1980-1992)
French Pulp – >10 000 pages – 8.50 €
Le pitch : Une nouvelle ère glaciaire s’est abattue sur la terre. La planète toute entière est recouverte d’une épaisse couche de glace. Heureusement, les Compagnies ferroviaires ont développé un immense réseau de voies ferrées, sur lesquelles se presse ce qu’il reste d’une humanité frigorifiée… et soumise.
Pour ne pas perdre leurs pouvoirs, les Compagnies interdisent tout progrès qui permettrait à l’humanité de se passer du rail. Et malheur à ceux qui, comme Lien Rag, tentent de défier leur autorité ! Pourchassé par les Compagnie, encerclé par une nature hostile, il est pourtant bien décidé à libérer l’humanité de l’existence misérable dans laquelle elle est maintenue…
Une saga indémodable qui a déjà conquis plusieurs générations de lecteur.
Mon avis : La compagne des glaces… tant de souvenirs et d’impression me remontent en mémoire à la simple lecture de ces quatre mots…
Si je vous parle de cette immense saga, aujourd’hui, au travers de la fiche du premier volume de la réédition de son intégrale, c’est pour vous faire partager une aventure unique et vous inciter à la vivre à votre tour, comme des centaines de milliers d’amateurs de science-fiction.
Imaginez un auteur de romans populaires – dans son sens le plus large – célèbre, polygraphe avéré (il dépassera les 400 romans [!!] écrits au cours de sa longue vie commencée en 1928, et qui n’est pas achevée à l’heure où j’écris ces lignes), qui entame en 1980 aux Editions Fleuve Noir une saga de SF.
Les maîtres chanteurs – Orson Scott Card (1980)
Folio SF – 466 pages – 8.60 €
Le pitch : Mikal, conquérant de la galaxie, a attendu son Oiseau chanteur pendant 79 ans. Jusqu’au jour où vint Ansset, jeune prodige de la Manécanterie capable de provoquer toutes les émotions possibles et de contrôler les personnes grâce à son chant, est repéré par Esste afin de servir le maître de la galaxie.
Complots, trahisons et assassinats seront le nouveau quotidien d’Ansset dans cet univers qu’est celui du pouvoir galactique.
Mon avis : D’Orson Scott Card, le grand public connait principalement le chef-d’œuvre La stratégie Ender, et ses nombreuses suites et spin-off. Cependant, son oeuvre va bien au-delà de ce cycle.
Je vous invite tout particulièrement à vous pencher sur la période magique 1979-1984 où, jeune auteur, il a écrit et publié trois romans (Une planète nommée trahison, Les maîtres chanteurs, Espoir-du-cerf) et un recueil de nouvelles (Sonate sans accompagnement) qui sont tous des livres inoubliables.
Les maîtres chanteurs est un roman d’une incroyable richesse de contenu, tout autant qu’un chef d’oeuvre de poésie. Card est avant tout un merveilleux conteur.
Les fontaines du paradis – Arthur C. Clarke (1979)
Folio SF – 480 pages – 9.70 €
Le pitch : Imaginez une station orbitale reliée à la Terre par un réseau de câbles, le long desquels un Transporteur spatial permettrait, tel un ascenseur, d’envoyer sans risque et à moindre coût hommes et matériel dans l’espace. Une telle invention serait à coup sûr le véritable départ de la civilisation spatiale.
En 2142, Vannevar Morgan, un ingénieur de génie à qui l’on doit déjà le pont reliant l’Europe à l’Afrique, s’attelle au projet. Mais bien vite il se heurte à un épineux problème : le seul lieu d’implantation possible pour le Transporteur se trouve au sommet d’une montagne sacrée où des moines prient depuis des millénaires.
Qui de la science conquérante ou de la foi inébranlable l’emportera ?
Mon avis : Les grands amateurs de littérature de S.F. connaissent Arthur C. Clarke pour au moins deux (bonnes) raisons.
La première, grâce – ou à cause – de 2001, l’odyssée de l’espace.
La seconde, pour son statut de scientifique internationalement reconnu (c’est lui l’inventeur du concept de satellite géostationnaire) et sa capacité à introduire un débat ou des notions éminemment scientifiques dans ses prospectives romanesques. D’où son titre informel de leader historique du mouvement hard science, cette « branche » de la SF où les auteurs imaginent l’avenir sous un angle essentiellement scientifique (d’où le nom, si vous suivez bien !).
C’est sur ce dernier point que Les fontaines du paradis ravira les amateurs du genre car rarement, un roman aura autant travaillé sur un défi scientifique (voir le pitch) avec autant de conviction et… de compétence !
Le guide du voyageur galactique – Douglas Adams (1979)
Folio SF – 288 pages – 7.80 €
Le pitch : Comment garder tout son flegme quand on apprend dans la même journée :
- que sa maison va être abattue dans la minute pour laisser place à une déviation d’autoroute ;
- que la Terre va être détruite d’ici deux minutes, se trouvant, coïncidence malheureuse, sur le tracé d’une future voie express intergalactique ;
- que son meilleur ami, certes délicieusement décalé, est en fait un astrostoppeur natif de Bételgeuse, et s’apprête à vous entraîner aux confins de la galaxie ?
Pas de panique ! Car Arthur Dent, un Anglais extraordinairement moyen, pourra compter sur le fabuleux Guide du voyageur galactique pour l’accompagner dans ses extraordinaires dérapages spatiaux moyennement contrôlés
Mon avis : Petit rappel pour les néophytes en matière de SF (ce n’est pas grave, il ne faut pas avoir honte, cela peut arriver à tout le monde de débuter !) : le titre de ce roman en français a beau avoir varié (il y a vingt ans, c’était le guide du routard galactique), son titre anglais est tout le temps resté le même, à savoir : The Hitch Hiker’s Guide to the Galaxy. Ce qui explique l’acronyme qui, depuis longtemps, sert de titre dans le monde entier : H2G2.
Ceci posé, que dire ? Que ce roman, issu d’un feuilleton radiophonique de la BBC dans les années 70, est certainement le seul livre que l’on pourrait attribuer, les yeux fermés, aux Monty Python. Aussi tarés, foldingues que Douglas Adams, ils auraient pu l’écrire (le groupe a d’ailleurs eu son propre feuilleton à la BBC au début des 70’s) ?
La guerre éternelle – Joe Haldeman (1976)
J’ai lu – 384 pages – 8.00 €
Le pitch : Imaginez une guerre si vaste que l’écho des batailles peut mettre plusieurs siècles à parvenir aux oreilles de ceux qui les ont ordonnées… enfin, de leurs descendants, en tout cas. Pour le soldat Mandella, membre de l’une des unités d’élite chargées de combattre les Taurans, le problème est inverse : lorsqu’il revient sur Terre après plusieurs mois de campagne, des décennies se sont écoulées.
Comment continuer à vivre, quand tout ce pour quoi on s’est battu n’existe plus ?
Mon avis : La guerre éternelle a été publié en 1974, après 18 refus d’éditeurs (chose courante pour les grands manuscrits, rassurez-vous !). C’est ce que raconte l’auteur dans une introduction qui explique comment il s’est battu pour publier, puis pour conserver le texte original du roman, qui finira par obtenir en 1976 tous les grands prix littéraires de la SF (Hugo, Nebula, Locus)
Un demi-siècle plus tard, il est fascinant de découvrir à quel point le thème de l’œuvre est universel et intemporel.
Ce que raconte Haldeman, c’est la nature de l’homme, agressive avant tout. La guerre éternelle ne fait pas mentir son titre, c’est vraiment un roman de guerre.*
Ecotopia – Ernest Callenbach (1975)
Folio SF – 336 pages – 9.40 €
Le pitch : Trois États de la côte ouest des États-Unis – la Californie, l’Oregon et l’État de Washington – décident de faire sécession et de construire, dans un isolement total, une société écologique radicale, baptisée Écotopia. Vingt ans après, l’heure est à la reprise des liaisons diplomatiques entre les deux pays. Pour la première fois, Écotopia ouvre ses frontières à un journaliste américain, William Weston.Au fil des articles envoyés au Times-Post, il décrit tous les aspects de la société écotopienne : les femmes au pouvoir, l’autogestion, la décentralisation, les vingt heures de travail hebdomadaire et le recyclage systématique. D’abord sceptique, voire cynique, William Weston vit une profonde transformation intérieure. Son histoire d’amour intense avec une Écotopienne va le placer devant un dilemme crucial : choisir entre deux mondes.
Mon avis : On ne prend jamais assez de temps pour remercier certains éditeurs français, pour leur capacité à aller piocher dans la littérature américaine des décennies passées afin d’en extraire un grand roman peu connu, voire oublié du lectorat francophone et le (re)traduire et le (re)publier.
C’est le cas de l’éditeur Rue de l’échiquier qui, grâce à une traduction de Brice Mathieussent, a exhumé Ecotopia des limbes d’outre-Atlantique, 40 ans après sa première édition (chez Stock), relayé par Gallimard en format poche dans la collection Folio SF.
Rendez-vous avec Rama – Arthur C. Clarke (1975)
J’ai lu – 253 pages – 5.50 €
Le pitch : En l’an 2130… un « objet » pénètre dans le système solaire et aussitôt les ordinateurs répondent : un cylindre, longueur : 30 km, vitesse : 100 000 km/h… Il sera baptisé Rama. Le vaisseau spatial Endeavour part à sa rencontre, réussit à se poser dessus et pour le commandant Norton et ses hommes l’accès de Rama se révèle étonnamment facile.
Un étonnement qui se change en stupeur, en effroi, quand ils pénètrent dans ses flancs : il y a là quatre mille km à explorer, un monde de structures, d’escaliers vertigineux, de routes. Un monde de silence et de non-vie… Où tout semble d’une haute technologie, intact, et pourtant vieux de millions d’années ! Rama continue de fendre l’espace… Qui est aux commandes : un robot ? un esprit ?
Mon avis : Clarke était un génie.
Rendez-vous avec Rama n’est pas considéré comme une de ses œuvres majeures, mais pourtant… j’ai une affection particulière pour ce roman, car c’est une histoire d’exploration, et j’adore les histoires d’exploration !
Imaginez Richard Burton (l’explorateur, pas l’acteur !) remontant, non pas les sources du Nil, mais l’intérieur d’un vaisseau-monde… Vous imaginez ? Alors, ici, vous êtes servi : un vaisseau gigantesque, aussi grand qu’un petit pays, à explorer avec, à chaque coin de rue (si je puis me permettre l’expression !) des mystères, des découvertes.
Les hommes protégés – Robert Merle (1974)
Folio – 448 pages – 8.50 €
Le pitch : A la suite d’une épidémie d’encéphalite qui ne frappe que les hommes, les femmes les remplacent dans leurs rôles sociaux, et c’est une Présidente, Sarah Bedford, féministe dure, qui s’installe à la Maison-Blanche. Le Dr. Martinelli, qui recherche un vaccin contre l’encéphalite, est enfermé avec d’autres savants à Blueville, dans une « zone protégée » qui les tient à l’abri de l’épidémie mais dans un climat de brimades, d’humiliations et d’angoisse. Martinelli acquiert vite la conviction que son vaccin ne sera pas utilisé, du moins sous l’Administration Bedford.
C’est paradoxalement chez les femmes qu’il trouvera ses alliées les plus sûres et par les femmes qu’il sera libéré. Mais, une fois Bedford remplacée à la Maison-Blanche par une féministe modérée, Martinelli saura-t-il s’adapter à une société où les hommes ne jouent plus qu’un rôle subalterne ?
Mon avis : Robert Merle ? Plus les années passent, plus il parait évident que l’homme restera comme un des auteurs français marquants du XX° siècle.
A côté de son roman de SF le plus connu (Malevil, un petit chef-d’oeuvre), il ne faut pas oublier de lire Les hommes protégés, tant son sujet reste d’actualité. Les hommes protégés est une pure dystopie, à placer au côté du terrible roman Le pouvoir, de Naomi Alderman.
Dans les deux récits, ce sont les femmes qui dominent le monde. Dans Le pouvoir, les femmes dominent les hommes – et abusent de leur position dominante, de manière dramatique – grâce à un pouvoir qui s’est développé uniquement chez elles. Dans Les hommes protégés, c’est un virus qui ne touche que les hommes qui a les a décimées.
Mais dans les deux cas, le résultat est le même : les femmes abusent de leur pouvoir et tyrannise les hommes, un monde à l’envers (lorsqu’on songe à certaines périodes de l’histoire de l’humanité) totalement effrayant, par sa violence et sa bêtise.
Les Dieux eux-mêmes – Isaac Asimov (1972)
Folio SF – 438 pages – 9.20 €
Le pitch : En 2070, la Terre vit dans la prospérité et le bonheur grâce à la Pompe à Electrons, qui fournit une énergie illimitée et gratuite. Une découverte extraordinaire, à moins que… A moins que cette invention miraculeuse ne constitue à plus ou moins longue échéance une menace imparable pour notre Univers ; un piège tendu par une civilisation parallèle pour annihiler notre réalité.
Seules quelques personnes ont pressenti la terrible vérité : un jeune physicien marginal, une Lunarite intuitionniste, un extraterrestre rebelle vivant sur une planète qui se meurt. Mais qui les écoutera ? Qui les croira ? Contre la stupidité, les Dieux eux-mêmes luttent en vain.
Mon avis : Une fois mis de côté la série géniale Fondation et les nouvelles (non moins géniales) sur Les robots, Les dieux eux-même (quel beau titre !) probablement le meilleur roman d’Isaac Asimov.
Composé de trois parties distinctes, le roman prend toute sa dimension dans une seconde partie absolument fabuleuse qui se déroule… ailleurs. Un univers où tous les repères du nôtre n’existent pas, peuplé d’êtres… différents.
Asimov se lance alors dans un exercice périlleux mais parfaitement réussi, faisant preuve d’une créativité que n’auraient pas renié les grands artistes du début du XX° siècle, entre cubistes, surréalistes et dadaïstes. Inoubliable.
Des fleurs pour Algernon – Daniel Keyes (1972)
J’ai lu – 542 pages – 6.90 €
Le pitch : » Si l’opération réussi bien je montrerai a cète souris d’Algernon que je peux être ossi un télijen quelle et même plus. Et je pourrai mieux lire et ne pas faire de fotes en écrivan et apprendre des tas de choses et être comme les otres. «
Charlie Gordon a 33 ans et l’âge mental d’un enfant de 6 ans. Il voit sa vie bouleversée le jour où, comme la souris Algernon, il subit une opération qui multipliera son Q.I. par 3. Charles va enfin pouvoir réaliser son rêve : devenir intelligent. Au jour le jour, il fait le compte rendu de ses progrès. Mais jusqu’où cette ascension va-t-elle le mener ?
Mon avis : Ce roman est considéré comme un classique de la science-fiction. Mais la part de science-fiction n’est qu’extrêmement réduite dans l’histoire, elle n’a même en fait aucune importance.
Certes, c’est grâce à une avancée scientifique que nous ne maîtrisons pas encore de nos jours que le « héros » du roman, ce pauvre Charlie qui a les capacités cognitives d’un tout petit enfant, se voit offrir la possibilité de devenir intelligent, très intelligent, suprêmement intelligent.
Mais tout l’intérêt du récit est de suivre comment il évolue, jour après jour, grâce au carnet de bord qu’il tient lui-même. D’une plume plus que malhabile au départ, bourrée de fôtes d’orthographe, dans un style d’une naïveté enfantine extrêmement touchante. Puis, au fur et à mesure que son Q.I. grimpe à la vitesse de la lumière, dans une langue châtiée qui dévoile lentement la profondeur stupéfiante de son intelligence et l’éclosion de son moi et de son surmoi.
Précipitez-vous sur ce roman qui, j’en suis persuadé, vous marquera pour le reste de votre existence.
Malevil – Robert Merle (1972)
Folio – 635 pages – 10.00 €
Le pitch : Une guerre atomique dévaste la planète, et dans la France détruite un groupe de survivants s’organise en communauté sédentaire derrière les remparts d’une forteresse.
Le groupe arrivera-t-il à surmonter les dangers qui naissent chaque jour de sa situation, de l’indiscipline de ses membres, de leurs différences idéologiques, et surtout des bandes armées qui convoitent leurs réserves et leur «nid crénelé» ?
Mon avis : Comme j’ai déjà pu le dire par ailleurs, Robert Merle est selon moi un des auteurs français majeurs de la seconde moitié du XX° siècle. Un style d’un classicisme parfait allié à une audace dans le traitement des sujets tout à fait étonnante,le tout lié à une science de la narration à tomber par terre et un humour formidable : voilà la définition d’un très grand auteur!
Au début des années 70, après avoir conquis gloire et renommée avec ses premiers romans tournant autour de la guerre (Week-end à Zuydcoote, La mort est mon métier) Robert Merle se lance dans la science-fiction.
Avec Malevil, il casse littéralement la baraque : gros tirages, critique unanime, une adaptation au cinéma très réussie dans la foulée. Quarante ans plus tard, il faut dire avouer : cet enthousiasme était parfaitement justifié !
Les Monades urbaines – Robert Silverberg (1971)
Pavillons poche – 352 pages – 9.50 €
Le pitch : En 2381, l’humanité a trouvé une solution à la surpopulation : c’est en se développant verticalement dans des monades urbaines, des tours de mille étages, qu’elle continue de croître. L’altitude détermine le niveau social des habitants, qui quittent rarement leur étage. Au sein de cette société, pandémonium sexuel sans tabou, les hommes semblent nager en plein bonheur. Toutefois, la création, l’imagination et l’individualité y sont considérées comme des notions dangereusement subversives.
C’est dans ce monde étrange que vont se croiser les destins de Micael, un électronicien qui rêve d’un monde antérieur, Jason, un historien qui découvre les affres de la jalousie, et Siegmund, un citoyen modèle. Tout se précipite quand Siegmund connaît une » défaillance » suite à une descente dans les bas étages. Bientôt, la situation vire au tragique.
Mon avis : Après une brève flambée de considération branchée dans les années 60 et 70, Robert Silverberg retombe, peu à peu, dans l’indifférence française distinguée des amateurs peu éclairés de SF.
Et pourtant… cet auteur majeur du genre, maître absolu de la narration maîtrisée et du développement des idées les plus dérangeantes, est toujours d’actualité. La preuve, ici, à l’heure où l’humanité se lance dans des constructions dépassant le kilomètre de haut.
Roman dystopique terrifiant où l’inhumanité du cadre se heurte au propos de l’auteur, riche d’intelligence humaniste, Les monades urbaines est un vrai chef-d’oeuvre.
Indispensable.*
Le monde du fleuve – Philip José Farmer (1971)
Mnemos – 1 280 pages – 30 €
Le pitch : Mark Twain, Hermann Goering, Jésus, Richard Burton. Voilà quatre des quarante milliards de protagonistes de cette fabuleuse saga. Lorsque tous les morts de l’histoire de la Terre se réveillent au bord d’un fleuve long de plusieurs millions de kilomètres, c’est une nouvelle vie qui commence. Mais au lieu de prendre cet événement comme une nouvelle chance, les ressuscités vont poursuivre ou répéter leur première existence. Et dans ce paradis où nul souci matériel n’existe, de petits états totalitaires, esclavagistes, racistes fleurissent.
Seule une infime partie de cette population décide de partir en quête : spirituelle pour certain avec la recherche d’une perfection de l’âme, plus existentielle pour ceux qui se demandent ce qu’ils font là et surtout qui les y a mis. Ils n’auront alors de cesse de remonter le fleuve pour voir ce qui se trouve à sa source.
Mon avis : L’édition en 2016 de l’ intégrale de cette saga comportant cinq volumes* est un bonheur qu’attendaient de nombreux amateurs depuis longtemps. Rien que ça, merci Mnemos !
1 280 pages serrées pour une des œuvres phare de l’histoire de la science-fiction qui, lorsque j’ai lue pour la première fois, quand j’étais encore adolescent, a marqué profondément mon imagination. Vous avez lu le pitch : Philip José Farmer lançait en 1970 une des plus fabuleuses idées de la SF.
40 milliards d’êtres humains reprenant conscience (ressuscitant ?) au pied de champignons géants, générateurs formidables. Des hommes qui se réveillent les uns à côté des autres, toutes époques et toutes ethnies confondues. Au milieu : un fleuve géant, apparemment sans fin.
Où sont-ils ? Au paradis ? En enfer ? Sur une autre planète ? A quelle époque ? Qui les a « ressuscités » ? Un ou des dieux ? Des extra-terrestres ?
Un bonheur insoutenable – Ira Levin (1970)
J’ai lu – 372 pages – 7.50 €
Le pitch : L’action de ce livre se déroule dans un futur qui n’est peut-être pas très éloigné. Toutes les nations sont désormais gouvernées par un ordinateur géant enfoui sous la chaîne des Alpes. Les humains sont programmés dès leur naissance – du moins ceux qui ont été autorisés à naître – et sont régulièrement traités par des médicaments qui les immunisent contre les maladies, mais aussi contre l’initiative et la curiosité.
Il y a cependant des révoltés. L’un d’eux, surnommé Copeau, va redécouvrir les sentiments interdits et d’abord l’amour. Il s’engage alors dans une lutte désespérée contre ce monde trop parfait, inhumain, qui accorde, certes, le bonheur à tous, mais un bonheur devenu insoutenable, parce qu’imposé.
Mon avis : Un des chefs-d’oeuvre de la dystopie, terme savant (et un peu pédant) utilisé pour désigner un récit peignant une société imaginaire organisée de telle façon qu’elle empêche ses membres d’atteindre le bonheur.
Placé au côté du meilleur des mondes, d’Huxley, ou de 1984, d’Orwell, Un bonheur insoutenable soutient franchement la comparaison sur le fond, même si Ira Levin n’est pas un styliste littéraire du même niveau que ces augustes prédécesseurs.
L’homme dans le labyrinthe – Robert Silverberg (1969)
J’ai lu – 308 pages – 7.40 €
Le pitch : « Muller vivait depuis neuf ans dans le labyrinthe. Maintenant, il le connaissait bien. Il savait ses pièges, ses méandres, ses embranchements trompeurs, ses trappes mortelles. Depuis le temps, il avait fini par se familiariser avec cet édifice de la dimension d’une ville, sinon avec la situation qui l’avait conduit à y chercher refuge. «
Tous les hommes qui avaient tenté de pénétrer dans le labyrinthe de Lemnos avant Muller étaient morts d’une façon atroce. Tous ceux qui avaient essayé de l’y rejoindre par la suite avaient été massacrés. Aujourd’hui, Ned Rawlins a reçu l’ordre de ramener Muller sur la terre, sa planète natale. Qui, neuf ans auparavant, l’a impitoyablement chassé…
Mon avis : Les années 60 furent les années bénies de la SF d’imagination, et Robert Silverberg était l’auteur du genre doté de la plus impressionnante imagination de l’époque.
Quant à L’homme dans le labyrinthe, c’est un des romans d’aventure emblématique de ce bon vieux Robert, dont le cerveau cliquetait presque aussi vite que sa machine à écrire (ce qui n’est pas rien). C’est dire s’il serait vraiment dommage que vous passiez à côté de ce court roman qui, même s’il n’est pas parfait (trop vite écrit ? Mal poli ?), s’inscrit dans la short list des incontournables de la littérature de SF.
En fait, en relisant ce bouquin pour la trois ou quatrième fois, je n’ai pu qu’être frappé par son potentiel cinématographique. Comment se fait-il qu’aucun producteur ne se soit encore emparé de cette histoire parfaitement construite pour une adaptation sur grand écran ?
Le cycle de Tschaï – Jack Vance (1968-1970)
J’ai lu – 960 pages – 10.90 €
Le pitch : Alors qu’il effectuait une mission de reconnaissance autour de la planète Tschaï, le vaisseau Explorateur IV a été abattu par un missile d’origine inconnue. Unique survivant du crash, Adam Reith découvre un monde d’une beauté et d’une âpreté sans pareilles, une terre d’aventures aussi dangereuse qu’attachante.
Obsédé par l’idée de rentrer chez lui, le Terrien va traverser d’immenses et splendides paysages, rencontrer d’autres humains aux moeurs baroques et des extraterrestres belliqueux, vivre mille péripéties, perdre ses certitudes et trouver l’amitié. Parviendra-t-il à regagner la Terre ?
Mon avis : Le cycle de Tchaï est constitué de quatre romans qui se suivent et se lisent à la suite les uns des autres : Le Chasch, Le Wankh, Le Dirdir et Le Pnume. Comme une série TV qui se déroulerait sur quatre saisons.
Ce cycle est désormais (enfin !) disponible en un seul volume format poche (merci J’ai lu !), que vous ne regretterez pas d’avoir acheté, si ce n’est à cause de sa taille : plus de 920 pages.
Tchaï est considéré comme un des romans emblématiques de l’histoire de la SF.
Une réputation tout à fait méritée car Jack Vance, entre 1968 et 1970, à littéralement imposé le cycle comme un des chefs-d’œuvre fondateurs (avec Dune, sans doute) du planet opéra, ce genre littéraire spécifique où un héros est amené à explorer une planète étrange et en affronter les dangers.
Pavane – Keith Roberts (1968)
Le livre de poche – 285 pages – 6.50 €
Le pitch : L’Invincible Armada, lancée, en juillet 1588, à l’assaut de l’Angleterre hérétique par les forces catholiques, triomphe de la tempête et profite de l’assassinat de la grande Elisabeth. La papauté pavoise. L’Histoire a changé de cours.
Au XX° siècle, des locomotives à vapeur disputent les routes aux cavaliers ; les nouvelles sont transmises par des réseaux de sémaphores ; on chasse les sorcières, et les seigneurs féodaux appuient leurs révoltes de sciences impies comme l’électricité et la chimie.
Mon avis : Si l’uchronie est depuis quelques années est un des genres à la mode de la SF, ce n’est pas sans raison, la première étant d’avoir généré une série de petits chefs-d’oeuvre qui ont d’ores et déjà marqué l’histoire de la littérature.
Pavane, de Keith Roberts, est un des premiers titres majeurs du genre. Publié en 1968, cinq ans après l’inoubliable Le maître du haut château de Philip K. Dick. Pavane n’a jamais atteint la célébrité (méritée) de ce dernier et, pourtant, il se situe tout en haut de la spécialité, tant pour son inventivité que pour la qualité exceptionnelle de son style et de son atmosphère.
La raison principale de ce manque de considération vient, sans aucun doute, du fait que Pavane n’est pas, à proprement parlé, un roman, mais plutôt un recueil de nouvelles se déroulant dans le même univers uchronique et dont les thèmes et même certains personnages sont communs.
La nuit des temps – Barjavel (1968)
Pocket – 416 pages – 7.60 €
Le pitch : Dans l’Antarctique, les chercheurs d’une expédition polaire font un relevé du relief sous-glaciaire. Un signal d’émetteur se fait entendre, des kilomètres sous eux. Cela paraît impossible, car la couche du sol où il émet date de plus de 900 000 ans. Pourtant, cela est vrai. Il y a de la vie sous la glace.
Des savants et techniciens du monde entier accourent alors afin de découvrir quelle civilisation perdue est enfouie sous le continent gelé. C’est une véritable alliance qui se créée dans le monde, chaque pays aidant à cette expédition incroyable.
Sous un dôme d’or, le monde entier découvre alors avec stupéfaction deux êtres vivants, humains, d’une beauté inégalable. L’une d’entre eux est Éléa, la plus belle femme que la Terre ait jamais portée, et va leur conter son histoire, celle de son amour et de son peuple disparu.
Mon avis : René Barjavel est le père de la science-fiction moderne française (Ravage, en 1943), dont il restera jusqu’à sa mort en 1985 le chef de file moral et l’auteur le plus populaire, à juste raison.
Barjavel est un merveilleux conteur, un poète et, comme beaucoup d’hommes nés comme lui à l’aube du XX° siècle, un utopiste dont les idées sont entrées en résonance avec celles de 1968.
La nuit des temps est enseigné depuis des décennies au collège, c’est un roman qui a donné envie de lire à des générations d’adolescents.
Logan’s run – W.F. Nolan & G.C. Johnson (1967)
Le pitch : Ce sont deux « vieux » de vingt-et-un ans, deux vieux qui n’ont plus que quelques heures à vivre et qui essaient d’échapper à la mort obligatoire.
Dans la paume de leurs mains clignote un cristal radio-actif. Et ce clignotement sonne le glas pour les deux fugitifs : dans quelques heures leur cristal deviendra noir et la police spéciale sera alertée… Car dans cette société de l’an 2116 tous les citoyens ayant atteint leur majorité doivent se livrer au « Profond Sommeil ».
Mon avis : Petit roman dystopique écrit à quatre mains juste avant 1968, inspiré par les aspirations de l’époque, L’âge de cristal n’est pas un chef-d’oeuvre, ce n’est pas une oeuvre fondamentale non plus, mais pourquoi en parle-t-on encore ? Et pourquoi a-t-il eu tant d’influence, au cinéma et dans la littérature de SF ?
Sans doute parce qu’il touche à des sujets particulièrement sensibles, le premier (l’eugénisme scientifique) venant paradoxalement à rebours des progrès de la science allongeant sans cesse l’espérance de vie. Sans doute aussi parce qu’il s’agit d’un roman court, vif, nerveux même, un roman d’action sur un thème quasi philosophique (le titre anglais Logan’s run, est beaucoup plus explicite que sa traduction).
Ubik – Philip K. Dick (1966)
10/18 – 288 pages – 7.10 €
Le pitch : « Une pulvérisation invisible d’Ubik et vous bannirez la crainte obsédante, irrésistible, de voir le monde entier se transformer en lait tourné ».
Qu’est-ce qu’Ubik ? Une marque de bière ? Une sauce salade ? Une variété de café ? Un médicament ? Peut-être… Et quel est donc ce monde où les portes et les douches parlent et n’obéissent aux ordres qu’en retour de monnaie sonnante et trébuchante ? Un monde où les morts vivent en animation suspendue et communiquent avec les vivants dans les « moratoriums ».
C’est dans cet univers que Glen Runciter a créé un organisme de protection contre les intrusions mentales : télépathie, précognition, para-kinésie. Joe Chip, un de ses employés, est chargé de monter un groupe de « neutraliseurs » de pouvoirs « psy », afin de lutter contre ce qui semble être une menace de grande envergure.
Mon avis : Relire, voire même re-relire un roman qui a marqué votre jeunesse, est un exercice périlleux. Confirmation de la première impression ? Parfait ! Déception profonde ? Cruelle manière de perdre un grand souvenir !
Avec Ubik, un des sommets de l’oeuvre de Philip K. Dick, j’ai ressenti tout au long de sa lecture un léger sentiment d’étourdissement, tant l’impression ressentie s’est révélée supérieure au souvenir, pourtant superbe, que je gardais en mémoire. Explication.
Mettons de côté le fait que la traduction française du grand Alain Dorémieux, datant de 1970, a pris un sacré, sacré coup de vieux (le roman mériterait vraiment une nouvelle traduction).
Mettons aussi de côté les nombreux décalages technologiques, parfois étranges, créés par le temps, un demi-siècle s’étant écoulé depuis son écriture (bien qu’on retrouve, de-ci, de-là, la capacité unique de Dick a anticiper sur le progrès, avec notamment un moteur de recherche « à la google » assez génial sur le principe). Une fois ceci fait, il reste juste un chef-d’oeuvre.
Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?
– Philip K. Dick (1966)
J’ai lu – 283 pages – 6.00 €
Le pitch : Le mouton n’était pas mal, avec sa laine et ses bêlements plus vrais que nature – les voisins n’y ont vu que du feu. Mais il arrive en fin de carrière : ses circuits fatigués ne maintiendront plus longtemps l’illusion de la vie. Il va falloir le remplacer. Pas par un autre simulacre, non, par un véritable animal. Deckard en rêve, seulement ce n’est pas avec ses maigres primes que lui rapporte la chasse aux androïdes qu’il parviendra à mettre assez de côté.
Holden, c’est lui qui récupère toujours les boulots les plus lucratifs – normal, c’est le meilleur. Mais ce coup-ci, ça n’a pas suffi. Face aux Nexus-6 de dernière génération, même Holden s’est fait avoir. Alors, quand on propose à Deckard de reprendre la mission, il serre les dents et signe. De toute façon, qu’a-t-il à perdre ?
Mon avis : Un des romans majeurs de Philip K. Dick, au titre absolument génial… et qui a une vraie signification ! Son adaptation à l’écran permit à l’auteur d’accéder à une célébrité mondiale, au moment même où il disparaissait prématurément (il est mort quelques jours avant la sortie du film).
Comme souvent chez Dick, c’est court, dense, complexe, d’une grande richesse intellectuelle (que de questions sur la notion d’humanité !) et profondément déprimant dans sa vision du futur… tant elle parait crédible !
Soleil vert – Harry Harrison (1966)
J’ai lu – 350 pages – 7.10 €
Le pitch : Tandis que l’humanité s’apprête à entrer clans le troisième millénaire, la surpopulation est devenue telle que les ressources naturelles ne suffisent plus à couvrir ses besoins. La nourriture et l’eau sont rationnées, il n’y a plus de pétrole, plus guère d’animaux. Trente-cinq millions de New-Yorkais, pour la plupart sans emploi ni logement, se battent pour survivre.
Andy Rush a un travail, lui. Tous les jours, avec les autres policiers de sa brigade, il part disperser les émeutes de la faim qui se produisent lors de chaque nouvelle distribution de nourriture de synthèse.
Alors, qu’importe si un nabab aux activités louches s’est fait descendre ? S’il parvenait à attraper le meurtrier, Andy le remercierait presque pour services rendus…
Mon avis : Parfois, un roman sort de l’anonymat pour des décennies, grâce à son adaptation au cinéma. Soleil vert est l’archétype de ce prototype d’oeuvre à laquelle un film devenu mythique a donné une seconde chance. Dans ce cas de figure, la lecture du roman, sur lequel le lecteur cinéphile va forcément plaquer des images chéries pendant des années, est presque toujours décevante.
Coup de chance : le livre d’anticipation d’ Harry Harrison échappe à cette malédiction et mérite de mener sa propre vie dans l’imaginaire des lecteurs. Le roman est un sacré bon bouquin ! Pour une raison très simple : c’est avant tout un polar du futur, avec un héros charismatique, un flic de base qui navigue au milieu du cloaque qu’est devenu la grosse pomme.
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Dune – Frank Herbert ( 1965)
Pocket – 928 pages – 11.50 €
Le pitch : Il n’y a pas, dans tout l’Empire, de planète plus inhospitalière que Dune. Partout des sables à perte de vue. Une seule richesse : l’épice de longue vie, née du désert, et que tout l’univers convoite.
Quand Leto Atréides reçoit Dune en fief, il flaire le piège. Il aura besoin des guerriers Fremen qui, réfugiés au fond du désert, se sont adaptés à une vie très dure en préservant leur liberté, leurs coutumes et leur foi. Ils rêvent du prophète qui proclamera la guerre sainte et changera le cours de l’histoire.
Cependant les Révérendes Mères du Bene Gesserit poursuivent leur programme millénaire de sélection génétique , elles veulent créer un homme qui concrétisera tous les dons latents de l’espèce. Le Messie des Fremen est-il déjà né dans l’Empire ?
Mon avis : Vous connaissez Dune. Tout le monde connaît Dune, surtout depuis que Denis Villeneuve l’a brillament porté à l’écran. Mais l’avez-vous lu ?
Mouais, c’est bien ce que je pensais : il y a beaucoup moins de lecteurs de Dune que l’on ne le pense généralement, car ce n’est pas un roman si accessible que cela.
Les 900 pages serrées de ce livre-monde (j’inclus ici Le messie de Dune, qui se trouve dans le même volume dans l’édition brochée Ailleurs et Demain de ma bibliothèque) demandent un peu d’exigence, car l’univers imaginé par Franck Herbert est d’une complexité inouïe.
Lune de miel en enfer – Fredric Brown (1964)
Folio SF – 368 pages – 8.10 €
Le pitch : En 1962, l’humanité est au bord du gouffre. La guerre froide tend sérieusement vers le chaud, et voilà que ne naissent plus que des filles. Ray Carmody va devoir accepter une mission sur la Lune d’un genre un peu particulier, mais si c’est pour sauver l’espèce humaine…
Al Hanley, alcoolique invétéré, va, lui aussi, mais sans le faire exprès, sauver la Terre d’un bien funeste destin. Les extraterrestres de la planète Dar n’en reviennent toujours pas !
En une vingtaine de nouvelles, Fredric Brown parvient à faire rimer science-fiction et humour. Il prouve, une fois de plus, qu’il et un maître de la forme courte.
Mon avis : Comme j’ai pu le dire par ailleurs, Fredric Brown est un merveilleux auteur de SF, un peu à part, car, comme Ray Bradbury, il ne se prend jamais au sérieux et n’hésite pas à introduire de la distance, voire un humour élégant, dans ses oeuvres. Et, comme Bradbury, il restera avant tout comme un formidable auteur de nouvelles, là où son humour et son sens aigu des paradoxes s’exercent le mieux.
Dans Lune de miel en enfer, on plonge dans un de ses meilleurs recueils. Fredric Brown est, avant tout, un champion des short, short novels, ces histoires tellement courtes qu’elles ne dépassent pas, souvent, les deux pages !
Dans les 21 nouvelles qui composent ce volume de 360 pages, le lecteur retrouvera avec plaisir quelques unes de ces très courtes nouvelles, construites et écrites par Brown juste pour le plaisir de le surprendre par une chute inattendue, paradoxale,
Comme souvent chez Brown, les thèmes développés ici tournent autour de ce qui préoccupait les américains à l’époque, c’est à dire dans les années 50 : la conquête de l’espace, les extra terrestres, et le risque d’une guerre nucléaire.
La vérité avant-dernière – Philip K. Dick (1964)
J’ai lu – 282 pages – 7.00 €
Le pitch : Depuis quinze ans ils attendent. Dans leurs abris souterrains. Prisonniers mais aussi protégés des gaz mortels et des radiations qui ont envahi la planète en guerre. Et pour cette guerre, ils fabriquent des sol dats-robots, à la chaîne. Rituellement, sur leurs écrans de télévision, apparaît le Grand Protecteur. De sa forteresse au cœur des Rocheuses, il les informe de l’évolution du conflit qui fait rage entre la Dém-Ouest et la Pacif-Pop.
Informations étranges, partielles, contradictoires, pense Nicolas Saint-James, le chef d’un des plus vastes abris. Alors, au péril de sa vie, Saint-James va se frayer un chemin jusqu’à la surface de la terre. Pour découvrir une vérité monstrueuse, insoutenable…
Mon avis : Je ne vais pas vous « vendre » Philip K. Dick, un des cinq auteurs majeurs de l’histoire de la littérature de SF (non, je ne donnerai pas les noms des autres !). Sachez simplement que la lecture de cet auteur, passé maître dans la projection paranoïaque des données de son époque de maturité (les années 50 et 60) dans des avenirs cauchemardesques, est indispensable à tout amateur du genre.
Tout en haut de son oeuvre : ses nouvelles, dont les innombrables idées ont permis de réaliser depuis près d’un demi-siècle une quantité industrielle de grands films. Juste derrière, une bonne demi-douzaine d’excellents romans. La vérité avant-dernière en fait partie.
Autant vous prévenir tout de suite : ce roman est une dystopie terrifiante !
La planète des singes – Pierre Boulle (1963)
Le pitch : Y a-t-il des êtres humains ailleurs que dans notre galaxie ? C’est la question que se posent le professeur Antelle, Arthur Levain, son second, et le journaliste Ulysse Mérou, lorsque, de leur vaisseau spatial, ils observent le paysage d’une planète proche de Bételgeuse : on y aperçoit des villes, des routes curieusement semblables à celle de notre terre.
Après s’y être posés, les trois hommes découvrent que la planète est habitée par des singes.
Mon avis : Pierre Boulle : voilà encore un auteur d’après-guerre qui n’est plus assez lu. Et pourtant, l’histoire de la planète des singes n’a jamais été autant à la mode, avec les nouvelles déclinaisons au cinéma revenant à l’origine du mythe.
Déclinaisons excellentes, d’ailleurs, je ne peux que vous conseiller fortement la dernière trilogie : La planète des singes – Les origines (2011), L’affrontement (2014) et Suprématie (2017)
Mais pour beaucoup, ce sont des films, un point c’est tout, alors qu’il y a, derrière, d’excellents livres. C’est le cas notamment pour ce roman, publié en 1963.
L’orange mécanique – Anthony Burgess (1962)
Robert Laffont – 352 pages – 9.50 €
Le pitch : Dans un monde dystopique furieusement proche du nôtre, le jeune Alex s’ingénie à commettre le mal sans le moindre remords : en compagnie de ses drougs, il se livre à la bastonnade, au viol et à la torture sur fond de musique classique. Bientôt incarcéré, il subit un traitement chimique qui le rend allergique à toute forme de violence.
Tout le génie de Burgess éclate dans ce livre sans équivalent, entre roman d’anticipation et conte philosophique. Le romancier, qui fut linguiste et compositeur, réussit en outre le prodige d’inventer une langue, le nadsat, dans laquelle son héros raconte sa propre histoire.
Mon avis : L’orange mécanique (avec un L apostrophe pour commencer) est l’exemple type de roman génial dépassé par son adaptation au cinéma. Qui ne connait pas le film fabuleux de Stanley Kubrick, qui a marqué son époque à sa sortie, il y a déjà un demi-siècle ? Et pourtant, le mérite en revient essentiellement à Anthony Burgess car le film « tient » presque entièrement dans le roman !
Dans un univers futur qui ressemble – malheureusement – beaucoup à certains quartiers de notre présent, Alex, le personnage principal du roman balade sa désespérance à coup d’ultra-violence, avec sa bande de copains (aujourd’hui, on dirait son gang). Il frappe, il boit, il viole, tout ça en écoutant du Beethoven… jouissance extrême.
Dès la première page, le lecteur est saisi à la gorge par le fond du récit (c’est un roman à réserver exclusivement aux adultes, tant il est violent), mais surtout par sa forme. L’idée géniale d’Anthony Burgess – qui était linguiste avant de mettre à l’écriture – est d’avoir inventé de toutes pièces une novlangue du futur, le nadsat, dans laquelle Alex s’exprime à la première personne.
Le maître du haut-château – Philip K. Dick (1962)
J’ai lu – 384 pages – 7.90 €
Le pitch : 1948, fin de la Seconde Guerre mondiale et capitulation des Alliés , le Reich et l’Empire du Soleil levant se partagent le monde. Vingt ans plus tard, dans les Etats-Pacifiques d’Amérique sous domination nippone, la vie a repris son cours. L’occupant a apporté avec lui sa philosophie et son art de vivre.
À San Francisco, le Yi King, ou Livre des mutations, est devenu un guide spirituel pour de nombreux Américains, tel Robert Chidan, ce petit négociant en objets de collection made in USA. Certains Japonais, comme M. Tagomi, grand amateur de culture américaine d’avant-guerre, dénichent chez lui d’authentiques merveilles. D’ailleurs, que pourrait-il offrir à M. Baynes, venu spécialement de Suède pour conclure un contrat commercial avec lui ? Seul le Yi King le sait. Tandis qu’un autre livre, qu’on s’échange sous le manteau, fait également beaucoup parler de lui : Le poids de la sauterelle raconte un monde où les Alliés, en 1945, auraient gagné la Seconde Guerre mondiale…
Mon avis : Prix Hugo 1963, Le maître du haut château est important pour au moins trois raisons.
La première, c’est que c’est ce livre qui rendit célèbre Philip K. Dick aux yeux du monde.
La seconde est qu’il ouvre la période majeure de l’auteur pour la littérature de SF (juste après viendra Ubick).
La dernière, c’est qu’il s’agit d’une des uchronies les plus célèbres et les plus réussies de l’histoire de la SF.
Fantômes et farfafouilles – Fredric Brown (1961)
Folio SF – 306 pages – 8.60 €
Le pitch : Un homme à la recherche d’une actrice prisonnière des Abominables Hommes des Neiges; un dictateur âgé de vingt-trois ans et sans doute contaminé par une intelligence extraterrestre; un âne qui sauve l’humanité d’une invasion martienne…
Tantôt cocasses, tantôt tragiques, et bien souvent horribles, les quarante-deux textes de ce recueil nous emmènent au-delà de l’apparence, sur les pentes glissantes de la terreur et de l’humour, au carrefour des étoiles.
Mon avis : Comme j’ai pu le dire plus haut, Fredric Brown est un merveilleux auteur de SF, un peu à part, car, comme Ray Bradbury, il ne se prend jamais au sérieux et n’hésite pas à introduire de la distance, voire un humour élégant, dans ses oeuvres
Et, comme Bradbury, il restera avant tout comme un formidable auteur de nouvelles, là où son humour et son sens aigu des paradoxes s’exercent le mieux.
Dans Fantômes et farfafouilles, Brown manie le concept de la « short, short novel » (selon le terme utilisé par les anglo-saxons pour désigner les textes ultra-courts, avec une chute/switch qui doit surprendre le lecteur) jusqu’à son comble. L’auteur pratique ici à merveille l’art du paradoxe.
En terre étrangère – Robert Heinlein (1961)
Le livre de poche – 768 pages – 8.90 €
Le pitch : Né sur Mars, Valentine Michaël Smith est retrouvé par une expédition de secours venue de la Terre : tous les membres de l’expédition ont péri et Valentine a été recueilli et élevé par les Martiens, ces curieux êtres qui peuplent la planète rouge.
Smith est ramené sur Terre mais il rencontre les pires difficultés à s’intégrer dans notre société. Son apparence est humaine mais son esprit est martien. Protégé par un écrivain célèbre et pittoresque, Jubal Harshaw, Smith réussira enfin à comprendre la place qu’il occupera sur la Terre, celle du nouveau Messie, rien de moins…
Mon avis : Comme j’ai pu l’écrire par ailleurs sur ce site, pour les vrais amateurs de SF, ceux qui bourlinguent depuis des années entre les romans du genre inventé il y a désormais plus d’un siècle par H.G. Wells et Jules Verne, Robert A. Heinlein est une référence.
Sans doute un des trois piliers du mouvement hard science, en compagnie d’Isaac Asimov et d’Arthur C. Clarke. Avec 4 prix Hugo en onze ans, entre 1956 et 1967. Rien que ça. Et, parmi tous ses romans, tous ses succès, c’est sans conteste En terre étrangère, publié en 1961, qui est à ce jour considéré comme son chef-d’oeuvre, l’acmé de sa carrière.
Lu alors que j’avais une quinzaine d’années, le roman m’avait laissé une impression très favorable et, bien qu’assez confuse avec le recul, assez troublante.
L’oiseau d’Amérique – Walter Tevis (1960)
Folio SF – 400 pages – 6.50 €
Le pitch : Au XXVe siècle, l’humanité s’éteint doucement, abreuvée de tranquillisants prescrits en masse par les robots qu’elle a elle-même programmés à cette fin. Le monde repose désormais sur les épaules de Robert Spofforth, l’androïde le plus perfectionné jamais conçu, qui possède des facultés inouïes… sauf, à son grand regret, celle de se suicider. Mais l’humanité moribonde se fend d’un dernier sursaut.
Paul Bentley, petit fonctionnaire sans importance, découvre dans les vestiges d’une bibliothèque l’émerveillement de la lecture, depuis longtemps bannie, dont il partagera les joies avec Mary Lou, la jolie rebelle qui refuse ce monde mécanisé. Un robot capable de souffrir, un couple qui redécouvre l’amour à travers les mots, est-ce là que réside l’ultime espoir de l’homme ?
Mon avis : Dans la lignée des grandes dystopies, L’oiseau d’Amérique est sans doute un des romans du genre parmi les plus récents et les moins connus. Pourtant, ce texte est un véritable petit bijou littéraire par la grâce du style de Walter Tevis, dont l’écriture nostalgique et d’une grande poésie m’a vraiment touché.
Le concept de départ est terriblement troublant : imaginer une dystopie où l’être humain vivrait sous l’oppression de robots dotés d’une intelligence artificielle extraordinaire. Des humains dégénérés, incapables de se reproduire par la faute d’êtres artificiels pourtant conçus, au départ, pour les protéger…
Ici, on ne parle pas des trois lois de la robotique inventées par le maître Isaac Asimov. Et même si elles existaient dans ce monde en fin de course à l’ambiance crépusculaire, elles n’auraient guère d’utilité…
Un cantique pour Leibowitz -Walter M. Miller Jr (1960)
Folio SF – 464 pages – 8.60 €
Le pitch : Dans le désert de l’Utah, parmi les vestiges d’une civilisation disparue, frère Francis de l’ordre albertien de Leibowitz a fait une miraculeuse découverte : d’inestimables reliques du martyr Isaac Leibowitz lui-même, qui jadis avait organisé la sauvegarde des dernières miettes du savoir balayé par le Grand Déluge de Flammes. C’est une lueur d’espoir en cet âge de ténèbres et d’ignorance, le signe tant attendu d’une nouvelle Renaissance. Mais l’humanité a-t-elle tiré les leçons d’un cataclysme qui l’a laissée exsangue, défigurée par le feu nucléaire ? Saura-t-elle enfin se préserver des apprentis sorciers ? Car l’Histoire, bientôt, menace de se répéter…
Mon avis : un roman en trois parties distinctes, éloignées de plusieurs siècles chacune.
Et une des plus fameuses uchronies de l’histoire de la SF, bien que cela n’en soit pas une au sens littéral du terme, car ce n’est pas le passé de cet univers qui ne s’est pas déroulé comme le nôtre, mais plutôt le passé que semble revivre l’humanité dans le futur, en une sorte de reboot effrayant (Je ne suis pas certain que ma phrase soit d’une clarté parfaite, mais il vous suffira de lire le livre pour mieux comprendre, ha ! ha !)
L’histoire serait-elle destinée à devenir un éternel recommencement ? C’est une des (nombreuses) questions qu’abordent ce roman passionnant. L’ensemble est très intelligent et, à mon avis, proprement fascinant.
Les croisés du cosmos – Poul Anderson (1960)
272 pages – Folio SF – 7.50 €
Le pitch : Messire de Tourneville s’apprêtoit à rejoindre le bon roi Édouard guerroyant en France quand un fantastique engin volant atterrit près de son château, libérant de drôles de petits hommes bleus aux longues oreilles. Le bon Roger les fait illico trucider.
Grâce au merveilleux char volant pris à l’ennemi, il ira libérer la Terre sainte. Mais trahison ! Un otage détourne à travers les espaces intersidéraux nos preux chevaliers qui, s’ils ne comprennent pas grand-chose, n’en démontreront pas moins ce qu’un loyal sujet de la Couronne d’Angleterre peut faire avec une simple arbalète, un peu de ruse et beaucoup de vaillance !
Mon avis : Un roman de science-fiction drôle au point de faire rire, ce n’est pas courant. Je pense à H2G2 (Le guide du voyageur galactique), bien entendu, mais à part cela… Il faut sans doute se diriger vers la SF contemporaine pour trouver des exemples de récits capables de prendre du recul avec ce genre qui, il faut bien l’admettre, se prend parfois un peu trop au sérieux…
Les croisées du cosmos est, dans ce créneau étroit, particulièrement réussi, car Poul Anderson, un des auteurs majeurs de l’âge d’or de la SF américaine était un petit rigolo, tout comme pouvait l’être Ray Bradbury, les deux ayant par ailleurs une sacrée plume…
Attention, pas d’ambiguïté : ne craignez pas tomber sur de la grosse farce, ce roman assez subtile est juste l’occasion de jeter un regard ironique sur les décalages de civilisation, avec une idée de départ particulièrement astucieuse.
Imaginez quelque chose comme une tribu sortie de la jungle amazonienne empruntant un avion pour envahir les Etats-Unis de Trump (tiens, en voilà une bonne idée !)…
Starship troopers (1959) – Robert A. Heinlein
J’ai lu – 364 pages – 7.60 €
Le pitch : Pour impressionner une fille et contrarier son père, le jeune Juan Rico s’engage dans l’Infanterie mobile, le corps d’armée réputé le plus dangereux. Après tout, il n’en a que pour deux ans, et la guerre est loin, aux confins de la galaxie.
Mais tandis qu’il effectue ses classes et découvre la discipline sévère d’un bataillon d’élite, le conflit prend une nouvelle dimension, et le voilà embarqué dans une série de batailles mortelles qui le transformeront à jamais.
Mon avis : Robert A. Heinlein, c’est du sérieux, un des auteurs majeurs de l’âge d’or de la SF, un contemporain et concurrent des plus grands, comme Arthur C. Clarke ou Isaac Asimov.
Avec Starship troopers, voici l’occasion de (re)découvrir sous une nouvelle traduction un roman publié jusque là en France sous le titre Etoiles, garde à vous !, un titre un peu ridicule puisque le titre original américain est bien Starship troopers.
Un préalable : en abordant ce très grand classique, perdez de vue toute référence avec son adaptation au cinéma réalisé en 1997 par Paul Verhoeven car, sinon, vous risquez d’être, soit déçu, soit déconcerté, car le film (que j’adore) n’a quasiment rien à voir avec le roman !
Minority report – Philip K. Dick (1956)
Folio SF – 448 pages – 8.90 €
Le pitch : Après Blade Runner, le chef-d’oeuvre de Ridley Scott, les textes de Philip K. Dick ont inspiré de nombreux films : Planète hurlante, Impostor, Minority Report, Paycheck, A Scanner Darkly, L’Agence…
Vous retrouverez dans ce recueil quelques-unes des nouvelles à l’origine de ces longs métrages, ainsi que Souvenirs à vendre («We Can Remember it for You Wholesale») adapté une première fois en 1990 puis de nouveau en 2012, sous le titre Total Recall, et The Minority report, adapté en 2002 par Steven Spielberg.
Mon avis : Ce livre est un recueil de nouvelles. Neuf nouvelles, dans l’ensemble assez longues, dont au moins deux sont passées à la postérité pour avoir été adaptées au cinéma : The Minority report, adapté par Spielberg (les autres éditions de poche portent ce titre, avec un visuel flashy de la tête de Tom Cruise dans le film), et We can remember it for your wholesale, adapté par Verhoeven sous le titre Total recall.
Ceci posé, venons en au fait : ces neuf nouvelles (parmi les 120 écrites par Dick au cours de sa courte vie) sont d’une lecture absolument indispensables, car elles permettent, pour celui qui ne connait pas l’auteur, d’avoir une sorte de digest très représentatif de son travail de novelliste.
Minority report ne fait que 60 pages et n’a qu’un rapport limité avec le film de Spielberg, et pourtant c’est un espèce de polar futuriste formidable.
Je suis une légende – Richard Matheson (1954)
Folio SF – 240 pages – 7.25 €
Le pitch : Comme vous, il croyait que les vampires ne hantaient que les mythes de l’Europe centrale et la littérature d’épouvante. Comme vous, il se trompait.
Il est aujourd’hui l’ultime survivant d’une étrange épidémie qui a fait subir à l’humanité une mutation irréversible : le virus qui contraint les hommes à se nourrir de sang les empêche aussi de mourir tout à fait et les oblige à fuir les rayons du soleil.
Ainsi, chaque jour, Robert Neville doit organiser sa survie et chaque nuit subir les assauts des demi-morts affamés. Mais l’horreur atteint son paroxysme lorsqu’il doit résister à l’appel suppliant de la femme qu’il aime…
Mon avis : La première fois que j’ai lu ce petit chef-d’oeuvre (petit par la longueur, immense par la qualité), je devais avoir douze ans, il m’a hanté des nuits et des nuits, des cauchemars épouvantables.
L’histoire est terrifiante, et le propos universel (qu’est-ce que l’homme ?). La preuve : on n’arrête pas de l’adapter au cinéma (la version avec Will Smith est étonnamment intéressante, bien que non fidèle à bien des égards) et les idées qu’il contient ont été pillées maintes et maintes fois par les scénaristes de ces vingt dernières années.
La force de ce roman, c’est de vous placer – vous, lecteur ! – immédiatement dans le peau de Robert Neville, le héros de l’histoire. Comment ne pas se mettre à sa place, comment ne pas se sentir complètement impliqué dans ce qui lui arrive… !
Ravage – René Barjavel (1953)
Folio – 313 pages – 8.50 €
Le pitch : En 2052… Fils de paysans venus du Sud-Est, de cette unique région de France où l’on cultive encore « à l’air libre », François Deschamps est « monté à Paris » pour y terminer ses études. Il a vingt-deux ans, un solide bon sens et un amour profond de la nature.
Aussi se sent-il mal à l’aise dans cette capitale super-mécanisée qui compte vingt-cinq millions d’habitants, où des engins vous permettent de faire le tour de la terre en vingt minutes, où des machines ont remplacé les hommes et où les hommes ne savent plus voir, ni entendre, ni se servir de leurs mains.
Or voici qu’un jour de juin, se produit « la panne ». La panne stupide, incroyable : brusquement l’électricité disparaît, laissant cette super-mécanique qu’est devenue l’humanité aussi démunie qu’un bébé et en proie à la panique.
Mon avis : Ravage est devenu, et restera, un grand classique de la SF, au côté de 1984 ou Le meilleur des mondes.
Le roman de René Barjavel est, sans conteste, le premier grand livre de SF française, écrit pendant la Seconde Guerre mondiale (1943). Un livre porteur de tant d’idées nouvelles qui, aujourd’hui, restent parfaitement d’actualité (le rapport de l’homme au progrès et à la Terre…)…
Et de tant d’images évocatrices : avec une étonnante prescience, l’auteur imagine ce que sera le monde un siècle plus tard. Entre les transports ultrarapides, les cités et le rôle prépondérant des machines, il tombe souvent en plein dans le mille !
Les enfants d’Icare – Arthur C. Clarke (1953)
Bragelonne – 336 pages – 7.10 €
Le pitch : Ils sont apparus sans crier gare, leurs immenses vaisseaux flottant au-dessus des plus grandes capitales mondiales.
Les Suzerains, des extraterrestres infiniment plus avancés, et qui affirment être là pour le bien de l’humanité. Et effectivement, même s’ils refusent pour le moment de se montrer, tout ce qu’ils font pour la Terre s’avère bénéfique : désarmement général, éradication des maladies, de la faim et de la misère.
Pourtant… ne faudrait-il pas se méfier de ces mystérieux bienfaiteurs ? Et se demander quelles sont leurs véritables intentions quant à l’avenir de l’espèce humaine ?
Mon avis : Arthur C. Clarke, disparu il y a dix ans, était né en décembre 1917. On a donc fêté récemment le centenaire de sa naissance. Comme le temps passe…
Cet auteur, grand journaliste scientifique par ailleurs, passionné d’astronomie et de plongée sous-marine, fut longtemps considéré comme le leader du mouvement Hard science, cette branche de la SF où les auteurs privilégient la spéculation scientifique à la prospective historique ou sociale.
Pourtant, en relisant Les enfants d’Icare, un des nombreux grands titres de Clarke, j’ai été frappé, non par la part du récit accordée à l’évolution scientifique, mais bien par sa dimension métaphysique !
Fahrenheit 451 – Ray Bradbury (1953)
Folio SF
Le pitch : Montag est un pompier du futur d’un genre particulier : il brûle les livres.
Jusqu’au jour où il se met à en lire, refuse le bonheur obligatoire et rêve d’un monde perdu où la littérature et l’imaginaire ne seraient pas bannis. Devenant du coup un dangereux criminel…
Mon avis : Comme j’ai pu l’écrire par ailleurs, Ray Bradbury est sans conteste un des auteurs majeurs de toute l’histoire de la science-fiction.
Fahrenheit 451 est son roman le plus célèbre, son talent s’étant épanoui surtout dans le format des nouvelles (y compris Chroniques martiennes, qui est un recueil de nouvelles).
Ce roman est d’une beauté et d’une tristesse sidérante, dont François Truffaut sut saisir l’essentiel dans son adaptation qui date déjà de cinquante ans (comme le temps passe…).
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Demain les chiens – Clifford D. Simak (1952)
J’ai lu – 283 pages – 8.00 €
Le pitch : Les hommes ont disparu depuis si longtemps de la surface de la Terre que la civilisation canine, qui les a remplacés, peine à se les rappeler. Ont-ils véritablement existé ou ne sont-ils qu’une invention des conteurs, une belle histoire que les chiens se racontent à la veillée pour chasser les ténèbres qui menacent d’engloutir leur propre culture ?
Fable moderne, portrait doux-amer d’une humanité à la dérive, Demain les chiens est devenu un classique de la littérature. Il est ici publié dans une nouvelle traduction, avec l’épilogue ajouté ultérieurement par l’auteur et une postface de Robert Silverberg.
Mon avis : Demain les chiens est l’oeuvre la plus célèbre de Clifford D. Simack, un des maîtres de la SF classique américaine. En relisant pour la troisième ou quatrième fois ce faux recueil de nouvelles, j’ai retrouvé toutes les sensations qui m’avaient marqué profondément, dès ma première lecture, alors que j’étais adolescent.
Demain les chiens est en fait un roman, composé de huit récits sans lien direct entre eux (d’où cette notion de « nouvelles » souvent utilisée à leur propos), mis en perspective historiquement par un système de « notes » , rédigées par ce qu’on imagine être un historien. Cette composition, particulièrement habile et rarement pratiquée dans la littérature, permet à l’auteur de retracer en tout juste 300 pages l’histoire de la fin de l’humanité.
Effacement progressif de l’homme, au bénéfice d’autres espèces animales, dont – en majeure – les chiens. Cet effacement résulte d’une succession de choix et décisions improbables de quelques humains à des moments clés.
Cycle de Fondation – Isaac Asimov (1951)
Folio SF – 832 pages – 14.90 €
Le pitch : En ce début de treizième millénaire, l’Empire n’a jamais été aussi puissant, aussi étendu à travers toute la Galaxie. C’est dans sa capitale, Trantor, que l’éminent savant Hari Seldon invente la psychohistoire, une science nouvelle permettant de prédire l’avenir.
Grâce à elle, Seldon prévoit l’effondrement de l’Empire d’ici cinq siècles, suivi d’une ère de ténèbres de trente mille ans. Réduire cette période à mille ans est peut-être possible, à condition de mener à terme son projet: la Fondation, chargée de rassembler toutes les connaissances humaines. Une entreprise visionnaire qui rencontre de nombreux et puissants détracteurs…
Mon avis : Le cycle de Fondation est un des dix chefs-d’oeuvre de la science-fiction, écrit par Isaac Asimov, l’homme à la plume prolifique qui fut, pendant une trentaine d’année, le patriarche absolu du genre, respecté par tous pour, au moins, deux inventions majeures : les trois règles de la robotique, dans sa série de nouvelles sur les robots, et la psychohistoire, dans Fondation .
Cette intégrale éditée par Folio SF (qu’il faut remercier de ses efforts actuels pour remettre « en ligne » dans les meilleurs conditions les œuvres fondamentales du genre), regroupe la trilogie originelle du cycle, composée des romans Fondation, Fondation et empire et Seconde fondation (vous pouvez vous arrêter là, les romans écrits beaucoup plus tard par Asimov, sous la pression du succès commercial, sont dispensables).
Cette trilogie, qui a remporté en 1966 le prix Hugo spécial de la meilleure série de science-fiction/fantasy de tous les temps, stupéfie le lecteur par son ambition, son ampleur et son intelligence. Constituée, en fait, d’une dizaine de nouvelles qui couvrent le futur de l’histoire humaine, l’oeuvre est un sommet de la science fiction intelligente des années 60, époque où les meilleurs auteurs du genre utilisaient le futur pour réfléchir sur l’histoire et l’humanité.
Chroniques martiennes – Ray Bradbury (1950)
Folio SF – 336 pages – 7.50 €
Le pitch : « J’ai toujours voulu voir un Martien, dit Michael. Où ils sont, p’pa ? Tu avais promis.
« Les voilà », dit papa. Il hissa Michael sur son épaule et pointa un doigt vers le bas. Les Martiens étaient là.
Timothy se mit à frissonner. Les Martiens étaient là – dans le canal – réfléchis dans l’eau. Timothy, Michael, Robert, papa et maman. Les Martiens leur retournèrent leurs regards durant un long, long moment de silence dans les rides de l’eau… »
Mon avis : Chroniques Martiennes (1950) est à mon avis un des trois livres fondateurs de la science-fiction moderne d’après-guerre, avec 1984 d’Orwell (1948) et Fondation d’Asimov (1951). Une oeuvre indispensable, que l’on enseigne désormais en Français au collège. Mais pour quelles raisons ?
Tout d’abord, parce qu’on y trouve une bonne partie de mythes fondamentaux de la littérature d’anticipation. Mais avant tout, parce que ce livre est merveilleusement écrit ! On ne répétera jamais à quel point Bradbury est une des plus belles plumes de toute l’histoire de la SF.
Le camaïeu de nouvelles qui compose cet ouvrage expose tout le talent de l’auteur avec ce qui sera à tout jamais sa marque : un mélange d’humour et de… poésie.
Drôle d’alchimie, allez-vous me dire ! Un mélange a priori improbable ? Eh bien non. Allez le vérifier, vous pouvez lire ce recueil plusieurs fois dans votre vie. Et l’offrir à tout le monde.
Le cycle des robots – Isaac Asimov (1950)
J’ai lu – 284 pages – 6.00 €
Le pitch : Susan Calvin est robopsychologue à l’United States Robots, Inc. Née en 1982, elle a aujourd’hui 75 ans. Ce livre relate ses souvenirs sur l’évolution du robot dans l’histoire humaine, depuis Robbie qui, en 1996, fut vendu comme bonne d’enfants jusqu’à Byerley qui devient président de la Fédération mondiale terrestre en 2044.
A travers ces récits, on voit comment le robot, d’abord esclave soumis à l’homme, parvient peu à peu à être son égal, avant de devenir son maître. Les souvenirs du Dr Calvin forment un livre au charme désuet qui fait revivre l’aube du XXIème siècle, époque où l’homme existait encore indépendamment de son compagnon de métal, le robot.
Mon avis : Le cycle des robots, dont voici le premier tome, forme l’ensemble de nouvelles et de romans le plus cohérents de la littérature de SF.
Le cycle repose sur les trois lois de la robotique, que même les plus novices d’entre vous connaissent, tant elles sont devenues l’exemple même de ce que l’extrapolation scientifique des meilleurs textes de la SF peut apporter à notre vie de tous les jours : il ne viendrait pas aujourd’hui à l’esprit d’un chercheur bossant sur l’ I.A. de s’en affranchir !
1984 – Georges Orwell (1949)
Folio – 438 pages – 8.20 €*
Le pitch : De tous les carrefours importants, le visage à la moustache noire vous fixait du regard. BIG BROTHER VOUS REGARDE, répétait la légende, tandis que le regard des yeux noirs pénétrait les yeux de Winston… Au loin, un hélicoptère glissa entre les toits, plana un moment, telle une mouche bleue, puis repartit comme une flèche, dans un vol courbe. C’était une patrouille qui venait mettre le nez aux fenêtres des gens.
Mais les patrouilles n’avaient pas d’importance. Seule comptait la Police de la Pensée.
Mon avis : Comment peut-on percevoir aujourd’hui 1984, plus de 30 ans après la date symbolique du titre du roman, et près de 70 ans après la publication du livre ? L’histoire a-t-elle vieilli ? Les thèmes évoqués sont-ils disqualifiés par l’évolution sociale, économique, politique et technologique de notre monde ? Le style d’Orwell est-il terriblement daté ?
Ce sont toutes ces questions que je me suis posées en relisant récemment (pour la quatrième fois, je pense), ce qui est sans doute un des trois ou quatre romans fondateurs de la science-fiction et une des œuvres majeures de la littérature du XX° siècle.
Et, à nouveau, je suis sorti de cette lecture avec la conviction profonde que cette dystopsie, selon le terme à la mode employé (d’ailleurs à tort et à travers) pour évoquer une oeuvre imaginant une société dont l’organisation aboutit aux malheurs de ses membres, est d’ores et déjà une oeuvre extraordinaire à la dimension intemporelle.
Le cycle du non-A – A.E. Van Vogt (1946)
J’ai lu – 800 pages – 11.00 €
Le pitch : XXVIe siècle. En prenant part aux jeux de la machine dans l’espoir de décrocher une place sous le soleil de Vénus, Gilbert Gosseyn découvre qu’il n’est pas l’homme qu’il a toujours cru être. Ses souvenirs ne lui appartiennent pas, son épouse, qu’il croyait décédée, ne l’est pas, et d’ailleurs, ce n’est même pas sa femme ! Pourtant, il comprend vite qu’il n’est qu’un pion au sein d’un vaste complot, dont la finalité lui échappe. Un pion ou la pièce maîtresse ?
Jalon majeur de l’œuvre de Van Vogt, immense classique de science-fiction, Le cycle du Â, qui comprend Le monde des Â, Les joueurs du  et La fin du Â, est ici publié pour la première fois dans son intégralité, dans les traductions de Boris Vian revues par Jacques Sadoul.
Mon avis : Van Vogt est parfois considéré par les amateurs hardcore de SF avec un peu de commisération. Pas assez rationnel, pas assez hard science, trop aventure, trop pulp, trop littérature populaire.
Contemporain de Arthur C. Clarke et Isaac Asimov, il a pourtant marqué l’histoire de la SF avec des romans comme A la poursuite des slans ou Le monde du non-A, qui est le premier volume d’un cycle de trois récits. Il serait donc dommage de passer à côté de ces pièces maitresses, qui sont suffisamment intelligentes, innovantes et passionnantes pour vous tenir en haleine quelques longues heures.
Au cours de votre lecture, vous pourrez vérifier que les idées de Van Vogt ont diffusé au cours des décennies suivantes et certainement influencé nombre de grands auteurs (impossible de ne pas noter par exemple une similitude entre le début de ce roman et la fameuse nouvelle de Philip K. Dick aujourd’hui connue sous le titre de Total recall).
Kallocaïne – Karin Boye (1940)
Editions Hélios – 237 pages – 7,90 €*
Le pitch : Dans une société où la surveillance de tous, sous l’œil vigilant de la police, est l’affaire de chacun, le chimiste Leo Kall met au point un sérum de vérité qui offre à l’État Mondial l’outil de contrôle total qui lui manquait.
En privant l’ individu de son dernier jardin secret, la kallocaïne permet de débusquer les rêves de liberté que continuent d’entretenir de rares citoyens. Elle permettra également à son inventeur de surmonter, au prix d un viol psychique, une crise personnelle qui lui fera remettre en cause nombre de ses certitudes. Et si la mystérieuse cité fondée sur la confiance à laquelle aspirent les derniers résistants n était pas qu un rêve ?
Mon avis : Bizarre, les hasards du destin… Qu’est-ce qui permet de passer, ou pas, à la postérité ?
Regardez : Huxley et Le meilleur des mondes ? Au panthéon de la littérature ! Orwell et 1984 ? Un des sommets du roman du XX° siècle. Enseignés dans les écoles, adaptés mille et mille fois. Et Karin Boye et son Kallocaïne ? Passés à la trappe, inconnus au bataillon, même pour un grand lecteur comme votre serviteur !
Alors qu’après ma lecture tardive de cette oeuvre majeure, je pense sans le moindre doute que le roman de cette auteure dont la courte vie s’est terminée par un suicide durant la seconde guerre mondiale est une dystopie à la portée aussi importante que les deux romans cités plus haut. Comme quoi, à quoi ça tiens, la gloire… Une vie trop tôt interrompue, une origine scandinave plutôt que britannique… Allez savoir…
Sur ce, trêve de considération philosophique : courrez lire cette petite merveille désespérée rééditée grâce à la ténacité de l’éditeur Les moutons électriques, dans sa collection Hélios !
Le meilleur des mondes – Aldous Huxley (1931)
Pocket – 320 pages – 4.95 €
Le pitch : 632 après Ford : désormais on compte les années à partir de l’invention de la voiture à moteur. La technologie et la science ont remplacé la liberté et Dieu. La vie humaine, anesthésiée, est une suite de satisfactions, les êtres naissent in vitro, les désirs s’assouvissent sans risque de reproduction, les émotions et les sentiments ont été remplacés par des sensations et des instincts programmés. La société de ce Meilleur des mondes est organisée, hiérarchisée et uniformisée, chaque être, rangé par catégorie, a sa vocation, ses capacités et ses envies, maîtrisées, disciplinées, accomplies. Chacun concourt à l’ordre général, c’est-à-dire travaille, consomme et meurt, sans jamais revendiquer, apprendre ou exulter.
Mais un homme pourtant est né dans cette société, avec, chose affreuse, un père et une mère et, pire encore, des sentiments et des rêves. Ce » Sauvage « , qui a lu tout Shakespeare et le cite comme une Bible, peut-il être un danger pour le » monde civilisé » ?
Mon avis : Le meilleur des mondes est probablement le premier roman de SF moderne. C’est également la première dystopie publiée, près d’une décennie avant Kallocaïne et deux décennies avant 1984.
C’est dire si l’on doit considérer avec un respect considérable le travail d’anticipation d’Aldous Huxley, qui était un auteur puissant, capable de travailler tout autant sur des récits d’imagination que sur de nombreux essais (il fut nommé sept fois pour le prix Nobel de littérature).
Près d’un siècle après sa sortie, Le meilleur des mondes sidère toujours par sa modernité, la qualité d’analyse sociologique et scientifique de l’auteur (qui prévoit de nombreuses avancées technologiques du XX° siècle et, notamment, anticipe de manière troublante sur les développements dans le domaine de la génétique et des risques d’applications eugéniques.
La langue d’ Huxley est riche, son discours et ses spéculations sociales, politiques et philosophiques vraiment puissantes; malgré cela, un lecteur moderne lira avec facilité ce récit pourtant profondément pessimiste, tant Huxley, en britannique bien étudié qu’il est, n’oublie jamais de teinter son propos d’ironie et même d’humour.
Un classique incontournable.
La peste écarlate – Jack London (1913-1914)
Actes sud – 120 pages – 6.60 €
Le pitch : Un ancien professeur d’université erre en compagnie de ses petits-enfants, revêtus de peaux de bêtes, dans un paysage désolé. Celui de la baie de San Francisco, ravagée soixante ans auparavant par un terrible fléau.
Nous sommes en 2013. Quelques hordes subsistent, et de rares survivants tentent de raconter le monde d’avant à des enfants qui ne savent même pas compter. La seule issue est de reprendre depuis les commencements la marche vers la civilisation perdue.
Jack London met toute sa puissance d’évocation au service de ce récit d’apocalypse, offrant de ces grandes peurs qui ravagent le monde une vision terrible – et quasi prophétique – et inscrivant de fait sa peste écarlate dans la lignée des fléaux bibliques, des terreurs millénaristes. Un texte qui prend dès lors une étonnante et inquiétante modernité.
Mon avis : La peste écarlate, c’est la (presque) fin du monde, raconté par Jack London. Un court roman mythique, un récit de science-fiction écrit par le très grand auteur de romans d’aventure et romans sociaux alors qu’il était à la fin de sa vie.
Ecrit en 1913-1914, ce roman est une parabole terrible sur ce qu’est le monde alors, un monde qui se perd. Avec une précision hallucinante, London décrit une civilisation humaine de 2013 surpeuplé de 7 milliards d’habitants…
La guerre des mondes – H.G. Wells (1898)
Folio – 320 pages – 7.80 €
Le pitch : «Je voyais maintenant que c’étaient les créatures les moins terrestres qu’il soit possible de concevoir. Ils étaient formés d’un grand corps rond, ou plutôt d’une grande tête ronde d’environ quatre pieds de diamètre et pourvue d’une figure. Cette face n’avait pas de narines – à vrai dire les Martiens ne semblent pas avoir été doués d’un odorat – mais possédait deux grands yeux sombres, au-dessous desquels se trouvait immédiatement une sorte de bec cartilagineux. […]
En groupe autour de la bouche, seize tentacules minces, presque des lanières, étaient disposés en deux faisceaux de huit chacun. Depuis lors, avec assez de justesse, le professeur Stowes, le distingué anatomiste, a nommé ces deux faisceaux des mains.»
Mon avis : Tout le monde connait La guerre des mondes, sans doute un des trois romans fondateurs de la science-fiction.
Tout le monde, également, à entendu parler de l’adaptation radiophonique mythique réalisée par le presque homonyme de l’auteur, Orson Wells, en 1938, émission qui créa un vent de panique aux Etats-Unis, certains auditeurs pensant écouter un reportage d’actualité.
Oui mais,une fois ceci posé – « pouf, pouf » comme disait Pierre Desproges – que reste-t-il de ce roman ? L’avez-vous lu ? Sans doute… pas ?
Si, effectivement, vous êtes passé à côté de ce chef d’oeuvre, et même si vous l’avez lu, par le passé, je vous invite à vous précipiter sur ce texte formidable dont la forme, effectivement proche d’un documentaire d’actualité, donne au récit une consistance réelle vraiment troublante.
La Machine à explorer le Temps – H.G. Wells (1895)
Folio SF – 176 pages – 7.90 €
Le pitch : La Terre en l’an 802.701 avait pourtant toutes les apparences d’un paradis. Les apparences seulement. Car derrière ces jardins magnifiques, ces bosquets somptueux, cet éternel été où les hommes devenus oisifs n’ont à se préoccuper de rien, se cache un horrible secret.
Ainsi témoigne l’explorateur du temps face à des auditeurs incrédules. Depuis la conception de son incroyable machine jusqu’à son voyage au bout de l’Histoire, là où l’humanité s’est scindée en deux. D’un côté les Éloïms, qui vivent en surface, petits êtres gracieux, doux et décérébrés. De l’autre les terribles Morlocks qui ont fui la lumière pour s’enterrer dans un gigantesque et inhospitalier monde souterrain. Un monde où l’Explorateur du Temps devra s’aventurer s’il souhaite répondre à ses questions, et surtout revenir à son époque.
Mon avis : Un des chefs-d’œuvre fondateur de la science-fiction, La machine à explorer le temps, premier et très court roman de Wells, ouvre d’un seul coup tout un pan de possibles.
C’est bien le génie de Wells qui lui permet d’imaginer que le temps est – d’une certaine façon – une quatrième dimension de notre univers.
Et c’est bien ce même génie qui lui permet de s’affranchir d’une exploitation médiocre du concept (après tout, il aurait pu situer son roman dans 50 ou 100 ans pour imaginer une évolution courte et limitée de l’humanité) et de se projeter, carrément, dans un futur si lointain que sa description en devient métaphorique.
L’Étrange cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde – R.L. Stevenson (1886)
Pavillons poche – 112 pages – 3.00 €
Le pitch : Lors d’une promenade nocturne dans les rues brumeuses de Londres, Utterson, notaire de son état, apprend que son vieil ami le Dr Jekyll a signé un chèque de dédommagement à la place d’un certain Mr Hyde qui avait bousculé une jeune fille. Troublé par cette nouvelle, Utterson se plonge dans le testament de son ancien camarade d’études qui stipule qu’en cas de décès ou de disparition d’une durée supérieure à trois mois, tous ses biens devront aller à son » ami et bienfaiteur Edward Hyde « .
Ce document inquiète le notaire. D’abord parce qu’il ignore tout de ce Mr Hyde, ensuite parce que ce dernier commence à être associé à un monstre imprévisible et répugnant. Utterson va alors enquêter sur le lien qui peut unir le Dr Jekyll et Mr Hyde. Mais il est loin d’imaginer les révélations macabres qui l’attendent.
Mon avis : Le cas étrange du Dr Jekyll et de Mr Hyde est certainement un des récits les plus adaptés de l’histoire de la littérature : télévision, cinéma, BD, elles se comptent par dizaines, en incluant certaines parodies dont la plus célèbre (et la plus réussie) est sans conteste Dr Jerry and Mister Love, de Jerry Lewis.
C’est dire l’importance de l’oeuvre : en écrivant ce très court roman (ou cette très longue nouvelle), Stevenson ne devait pas imaginer une seconde qu’il touchait à à un thème à la portée universelle !
20 000 lieues sous les mers – Jules Verne (1869-1870)
Folio – 400 pages – 5.90 €
Le pitch : Un monstre marin, « une chose énorme », ayant été signalé par plusieurs navires à travers le monde, une expédition est organisée sur l’Abraham Lincoln, frégate américaine, pour purger les mers de ce monstre inquiétant.
À bord se trouvent le Français Pierre Aronnax, professeur au Muséum de Paris, et Conseil, son fidèle domestique. Une fois parvenus en vue du monstre, deux immenses trombes d’eau s’abattent sur le pont de la frégate, précipitant Aronnax, Conseil et le harponneur canadien Ned Land sur le dos du monstre qui se révèle être un fabuleux sous-marin, le Nautilus, conçu et commandé par un étrange personnage, le capitaine Nemo, qui paraît farouchement hostile à toute l’humanité !
Condamnés à ne plus jamais revoir leur patrie, leurs parents, leurs amis, la plus extraordinaire aventure commence pourtant pour les trois hommes…
Mon avis : J’ai pu expliquer par ailleurs, à propos de Jules Verne, comme un roman adoré alors qu’on était adolescent, peut parfois être décevant à la relecture, des années plus tard. Ce fut le cas pour Voyage au centre de la Terre.
Heureusement, les relectures sont parfois beaucoup plus heureuses, et c’est le cas pour Vingt mille lieux sous les mers ! Ce très gros roman n’est pas parfait, loin de là.
On y retrouve en effet le principal défaut – et le péché mignon – de Jules (vous permettez que je l’appelle Jules ?) : la propension à dérouler un savoir scientifique autodidacte (celui de l’époque, parfois très daté) sans y mettre de limites, au risque de casser, parfois, le cours du récit, et en décourager certains (j’ai pu remarquer à quel point la lecture peut rebuter, aujourd’hui, certains adolescents).*
Dans 20 000 lieues, il y a n’y a pas 20 000 lignes de ce type, mais cependant de nombreux passages trop longs où Jules se fait un peu trop plaisir. Mais à côté de ça, quelle aventure !
De la terre à la une/Autour de la lune – J. Verne (1865-1869)
Le livre de poche – 510 pages – 2*4.90 €
Le pitch : A la fin de la guerre fédérale des états-Unis, les fanatiques artilleurs du Gun-Club (Club-Canon) de Baltimore sont bien désœuvrés. Un beau jour, le président, Impey Barbicane, leur fait une proposition qui, le premier moment de stupeur passé, est accueillie avec un enthousiasme délirant. Il s’agit de se mettre en communication avec la Lune en lui envoyant un boulet, un énorme projectile qui serait lancé par un gigantesque canon !
Tandis que ce projet inouï est en voie d’exécution, un Parisien, Michel Ardan, un de ces originaux que le Créateur invente dans un moment de fantaisie, et dont il brise aussitôt le moule, télégraphie à Barbicane : « Remplacez obus sphérique par projectile cylindroconique. Partirai dedans »…
Mon avis : Jules Verne est, en quelque sorte, le créateur du mouvement Hard science, en SF, plus d’un siècle avant qu’on invente le mot et le mouvement ! Lorsqu’il écrit ce roman, il n’a pas encore quarante ans et il vient de terminer sa première oeuvre d’importance, Voyage au centre de la Terre.
Ce récit fait clairement partie des œuvres dans lesquelles le lecteur trouve le plus de développements scientifiques. Cela pourrait être rébarbatif, et c’est passionnant.
Frankenstein – Marie Shelley (1818)
Folio SF – 336 pages – 4.80 €
Le pitch : A la suite d’une manipulation scientifique hasardeuse, Victor Frankenstein parvient à « animer la matière inerte » et crée un nouvel homme. Mais, horrifié par sa créature, il l’abandonne. Livré à lui-même, rejeté par tous ceux qu’il croise, le monstre, plein de haine, se révolte contre celui qui lui a donné la vie.
Dans ce terrifiant roman qui mêle le gothique, le fantastique et la science-fiction, Mary Shelley peint un être aussi effrayant que touchant, qui aspire désespérément à se rapprocher des hommes…
Mon avis : Le Frankenstein de Mary Shelley fait certainement partie des romans qui, dans l’histoire littéraire, ont véhiculé le plus d’images, de fantasmes, nourri le plus l’imagination des lecteurs et inspiré celle des auteurs. Pourtant, aujourd’hui, ce livre fondamental, dans le sens propre du terme, est très peu lu.
Raison la plus souvent invoquée ? C’est un bouquin d’horreur désuet, au style démodé. Rien n’est plus faux. Sans Frankenstein de Shelley, sans Dracula de Bram Stoker, et sans les Nouvelles d’Edgar Poe, la littérature contemporaine ne serait pas la même. Ces auteurs ont, à eux trois, créé des mythes, inventé un genre, défini des règles. Frankenstein, c’est l’invention de la créature qui échappe à son démiurge et c’est le déni de la mort, qui devient réversible.
A la (re, re, re) lecture de ce roman, j’ai été frappé par la complexité et la modernité de sa construction, agencement subtil de roman épistolaire et de récit à plusieurs voix qui en inspirera plus d’un par la suite. Tout le monde oublie que Mary Shelley l’a écrit en 1818, vingt ans après Dracula, alors que le roman moderne commençait à peine à prendre son essor !
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Cdlt
Karl
Merci beaucoup pour ses remarques, les liens ont été rajoutés !
… pour faire suite à mon message précédent je me suis rendu compte que le lien Amazon fonctionne en allant sur le lien « Lire la suite ».
Cependant, ce lien renvoie systématiquement vers le format poche du roman sur le site marchand. Si je choisis le format Kindle, êtes-vous rétribué quand même ?
Karl.
Je vous confirme que cela fonctionne pour tous les formats. Merci de votre sollicitude !
Quelle magnifique sélection.
J’ai lu tout ça, et je sais maintenant ce que j’ai envie de relire,
même si je pense que Dan Simmons n’est pas aussi irrégulier que ça 😉
Merci.
Merci beaucoup !
Bonjour je recherche un livre je pense des années 60-70
c’est un vaisseau avec à son bord des humains et qui gravite autour d’une planéte. Toutes les semaines ils regardent la planète et celle-ci change de siècle et jusqu’à ce que les humains descendent sur cette planète et parlent avec des êtres de lumière
Bonjour je suis à la recherche d’un livre S.F des années 40/50/60 je ne sais plus je ne me souviens plus de l’auteur ainsi que du titre mais l’histoire raconte :
des Cosmonautes en orbite autour d’une planète (qui a chaque fois qu’ils decendent sur cette planète ou bien qu’ils regardent avec des caméras) celle-ci change d’époque, jusqu’à ce qu’ils rencontrent des êtres de lumière qui habitent sur cette planète
bien cordialement Mario
Voilà une question intéressante… mais j’ai bien peur de ne pas pouvoir vous aider, la piste manque de détails !