Le Château des animaux
Casterman BD
Le Château des animaux
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Le pitch
Quelque part dans la France de l'entre-deux guerres, niché au cœur d'une ferme oubliée des hommes, le Château des animaux est dirigé d'un sabot de fer par le président Silvio...
Secondé par une milice de chiens, le taureau dictateur exploite les autres animaux, tous contraints à des travaux de peine épuisants pour le bien de la communauté...
Miss Bengalore, chatte craintive qui ne cherche qu'à protéger ses deux petits, et César, un lapin gigolo, vont s'allier au sage et mystérieux Azélar, un rat à lunettes pour prôner la résistance à l'injustice, la lutte contre les crocs et les griffes par la désobéissance et le rire...
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Mon avis
En introduction de ce premier volume de la saga du Château des animaux (qui doit en compter quatre), Xavier Dorison évoque clairement les sources de son inspiration.
Il tient à souligner que ce projet très ambitieux (près de 300 planches au total !) part de la volonté de revisiter le fameux roman de George Orwell, La ferme des animaux.
Mais il précise aussitôt que son objectif n'était pas d'adapter littéralement la fable anthropomorphique d'Orwell, mais bien de l'universaliser.
Publié en 1945, La ferme des animaux était une parabole sur les dictatures, mais aussi, plus particulièrement sur les dangers et les mécanismes de fonctionnement du communisme.
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Avec Le château des animaux, Dorison s'attaque au poison des totalitarismes, mais de tous les totalitarismes, en expliquant qu'au XX° siècle, certains héros du quotidien (Mandela, Gandhi) ont trouvé une voie étroite en luttant contre ce fléau par d'autres moyens que la force.
Démontrer qu'il est possible de détruite la dictature par le courage et l'intelligence, voilà le pari de ce projet.
Ceci posé, je tiens à vous avertir tout de suite : Le château des animaux est la BD la plus impressionnante que j'ai eu l'occasion de lire au tournant 2019/2020.
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Impressionnante par son scénario d'une intelligence rare, mais aussi par son découpage terriblement efficace, alternant les plans larges (avec des vignettes parfois d'un tiers ou d'une demi-page) et les focus ultraserrés sur un détail, un visage.
Dorison, auteur prolifique, n'est pas forcement renommé pour la subtilité de ses scénarios.
Mais ici, il retrouve la veine et l'intelligence de narration des deux premiers tomes de la saga Undertaker, ou des deux premiers de Long John Silver (j'espère qu'il tiendra cette fois-ci la distance sur tous les albums !).
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Pas de doute : cet album est un Tourne Page en or massif, une histoire vraiment subtile, alternant scènes dramatiques et passages plus légers (le personnage de César, le lapin gigolo, est un biais génial pour alléger de temps en temps l'ambiance pesante du récit !).
Impressionnante aussi, à part de mérite égale, par ses graphismes.
70 planches absolument parfaites, dessinées par Felix Delep, un petit génie de 26 ans (!) qui se lançait ici dans sa première BD (!!).
Felix Delep fait ses études préparatoires au crayon, mais les planches sont entièrement dessinées à la tablette graphique (impossible de le déceler !).
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Champion du dessin animal - ce qui est plutôt une bonne chose pour se lancer dans une BD anthropomorphique ! -, il réussit à marier semi-réalisme pour les décors avec un dessin vraiment caricatural pour les animaux, à qui il a attribué des attitudes et des têtes extrêmement expressives.
Delep a, parmi les références qu'il cite, deux maîtres : Don Bluth pour l'animation; Franquin pour la BD. Je n'en vois pas de meilleurs !
Précipitez-vous sur cette petite merveille. Absolument indispensable !
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