Le diable, tout le temps
Albin Michel/ Le livre de poche
Le diable, tout le temps
Albin Michel/ Le livre de poche
Le pitch
De l'Ohio à la Virginie-Occidentale, de 1945 à 1965, des destins se mêlent et s'entrechoquent : un rescapé de l'enfer du Pacifique, traumatisé et prêt à tout pour sauver sa femme malade , un couple qui joue à piéger les auto-stoppeurs , un prédicateur et un musicien en fauteuil roulant qui vont de ville en ville, fuyant la loi.
La prose somptueuse de ce premier roman de D. R. Pollock contraste avec les actes terribles de ses personnages.
Un univers terrifiant que la critique n'hésite pas à comparer à ceux de Flannery O'Connor, Jim Thompson ou Cormac McCarthy.
Mon avis
Alors, j'y vais carrément : je crois qu'il s'agit du meilleur livre que j'ai lu en 2014, et un des meilleurs de ces dix dernières années ; ce qui, vu le nombre de pages que j'ingurgite régulièrement depuis 50 ans, est un sacré compliment, je vous le jure !
Mais, me demanderez-vous, pour quelles raisons ?
La première - et c'est la marque des chefs-d'oeuvre - c'est que ce roman d'une noirceur inégalé - jamais un livre n'eut un titre plus approprié ! - ne ressemble à aucun autre.
Impossible de le classer, de le mettre en parallèle avec un autre : c'est unique.
La seconde, c'est que, cette histoire, qui est en fait multiple (plusieurs destins qui s'entremêlent dans l'Amérique profonde pour, parfois, se rejoindre), est écrite dans une prose hypnotisante.
Un qualificatif rarement utilisé à ce propos, mais on ne peut plus juste en l'espèce : ce que vous lisez est glauque, éprouvant, et même parfois atroce, mais vous ne pouvez vous empêcher de poursuivre...
La dernière, c'est qu'une fois terminé, des images vous restent dans la tête, longtemps, très longtemps. Certaines d'entre elles viendront même vous visiter la nuit, et ça...
Le résultat est d'autant plus étonnant que l'auteur s'est révélé sur le tard.
Imaginez ce destin improbable : Donald Ray Pollock était ouvrier et conducteur de camion jusqu'à 50 ans, âge auquel il s'est mis à écrire. Le diable, tout le temps est son premier roman. Incroyable !
Je vous invite, si la lecture de ce joyau noir comme le diable vous a comblé autant que moi, à découvrir ensuite Knockemstiff, le recueil de nouvelles écrites juste avant ce roman.
Vous y trouverez, de manière absolument fascinante, absolument toutes les racines de ce récit : les thèmes, les obsessions, le style... Incroyable !
Bien que l'histoire se déroule dans les vingt années qui ont suivi la seconde guerre mondiale, ce roman est celui de l'Amérique contemporaine fantasmée, ce pays où cohabitent désormais des êtres aussi dissemblables que pourraient l'être des moines tibétains et des traders de Wall Street.
L'Amérique de la ceinture de rouille, celle qui a voté massivement pour Donald Trump fin 2016... (à propos : pas de chance pour le prénom, Pollock ! Par contre, le patronyme est plutôt approprié, pour un artiste !)
Une précision : ce roman est réservé, je tiens à vous prévenir, à un lectorat adulte et averti.
N'essayez surtout pas de le glisser entre les mains d'un enfant, d'un adolescent ou d'une personne trop sensible : vous prenez le risque de le choquer, voir de le traumatiser pour un bon bout de temps !
Un chef-d'oeuvre à offrir aux grands lecteurs.
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